samedi 30 janvier 2021

Katrien Delavier (1961-1998)

mise en ligne le 18/10/2009
mise à jour le 30/12021 : ajout d'une vidéo + liens des CD


Cassette auto-production - 1989



1-An paistin fionn (hornpipe)
2-Tom Watt's jig / Bolt the door (jig)
3-The Aran boat (slow air) / The man in the house (reel)
4-Fontanella / An dro
5-Old hag you've killed me / The cliffs of Moher (jigs)
6- Shetland's reels
7-The star of County Dawn / Wheelan's jig
8-Off to California / The plains of Boyle (hornpipes)
9-Two reels
10-Dans plinn
11-Glen cottages polkas

Katrien Delavier : harpe celtique
Gérald Ryckeboer : uilleann pipes, bouzouki, guitare

Illustration : Guy Gervais

C’est le premier enregistrement de Katrien fait « à la maison », elle a ensuite enregistré deux CD : Harpe irlandaise (1992) et Harpe d’Irlande (1995) et a participé en tant que harpiste au groupe Hempson pour le CD Musique ancienne irlandaise (1996).

téléchargez  ici

525 téléchargements au 1/6/1013


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La cassette intégrale, illustrée d'une quarantaine de photos des groupes Ceilidh, Vents Contraires, Blootland, le "quartet" de harpes composé du duo K. Delavier et Violaine Mayor + le groupe Ogham Katrien avec Elise Wuillemin, et Juliette Collache, de ses élèves des cours de harpe et guitare de la MJC Rosendael, et autres évènements ponctuels (Fête de la Nature et mariage à Coudekerque Branche) auxquels elle a participé.






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La Voix du Nord 24 septembre 1998



hommage sur France-Musique




Un autre hommage ICI



Discographie









dimanche 24 janvier 2021

Les cornemuseux de la Saint-Druon

mis en ligne le 14/12/2009
mise à jour le 24/1/2021 : photo d'un des derniers bergers d'Artois à Rebreuve

Trad Magazine, n° 50, novembre 1996




Par Patrick Delaval

Un tableau
Ce tableau est un lavis coloré – tons bistre, gris-vert et rouge brique – rehaussé d’encre. Il porte en légende : « Procession de Saint-Druon, Patron des Bergers ». Il est signé et daté en bas à gauche : Ph.d.R. 1823. Ces initiales sont celles de Philibert Damiens Comte de Ranchicourt, né le 18 novembre 1781, décédé le 8 octobre 1825. Deux médailles l’avaient signalé lors des expositions de Douai en 1823 et 1825. Le château de Ranchicourt et le village ont été rattachés en 1791 à la commune de Rebreuve, située à quelques kilomètres de Bruay-Labuissière, sur la chaussée Brunehaut, ancienne voie romaine qui relie Arras à Thérouanne. Nous sommes donc en pleines collines d’Artois au début du XIXe siècle, et tous ceux qui ont collecté dans cette région comprendront l’importance de ce tableau : c’est la première fois qu’on découvre une preuve iconographique de la cornemuse dans le Pas-de-Calais pour cette période. La Piposo était attestée par de rares textes [1] citant l’Artois et le Boulonnais, et quelques mentions près de Lille… lire la suite ci-dessous
[1]
par exemple : dans le Lexique Saint-Polois d'Edmond EDMONT, Saint-Pol sur Ternoise, 1897 : "Piposo : substantif masculin, cornemuse, par extension joueur de cornemuse. A Ligny Saint Flochel : piposo : féminin, Ju d' pip' masculin."






Cliquez sur les images pour les agrandir


En écho : mai 1963 M. Hermant l'un des derniers bergers d'Artois, à Rebreuve
couverture de la revue des mineurs Bruits et Lumières n°20



samedi 23 janvier 2021

Quand Jérémie jouait de l'accordéon

Des Français, principalement des militaires, mais des réfugiés civils aussi, se trouvaient à Londres, pendant la guerre 39-45. Il y avait dans le nombre des Dunkerquois et des Dunkerquoises. Tous partagèrent avec la population londonienne les épreuves des attaques aériennes livrée par les Allemands et les difficultés qu'apporte la guerre dans la vie quotidienne. Mais il y avait, de temps à autre, de bons moments, notamment ceux que l'on passait dans les manifestations artistiques et dans les restaurants et cafés français de la capitale anglaise.

Jérémie joue chez Jacqueline


Marcelle Devynck, domiciliée à Saint-Pol-sur-Mer, a fait allusion dans un précédent article (La Voix du 26 mai) à un club où se retrouvaient le soir des Français et aussi des Canadiens francophones, à Londres. C'était Chez Jacqueline. Une ambiance chaleureuse y régnait. Les Dunkerquois affectionnaient cet endroit car l'un des leurs, Jérémie Barbry, y jouait de l'accordéon quand son service le lui permettait. Né en 1919 à Bray-Dunes, servant dans la Marine en Indochine, Jérémie avait participé à bord du croiseur La Motte-Picquet, à la bataille de Koh-Chang contre l'escadre siamoise, en janvier 1941, quand il rejoignit la France Libre en 1942. Chauffeur à l'Amirauté des FNFL à Londres, il était virtuose de l'accordéon, si bien qu'il joua dans les hôpitaux militaires pour distraire les soldats malades et blessés, donna des aubades au départ des bateaux partant en campagne et se fit entendre à plusieurs reprises à la BBC (*) ainsi que dans des concerts de la Croix-Rouge britannique et de la Fondation Saint-John des prisonniers de guerre.

Il tint aussi de petits rôles dans des spectacles de théâtre et de variétés. Ainsi, il joua au Théâtre Molière (association de théâtre français) dans l'Anglais tel qu'on le parle de Tristan Bernard et, pour l'Institut français du Royaume-Uni, dans Le Paquebot Tenacity de Charles Vildrac, avec des comédiens français dont Paul Bonifas, de la Comédie Française. Il fit de la figuration dans un film américain de la Warner Bros, Flight from Sin. et, le soir donc, il trouvait encore le temps de charmer à l'accordéon le public assemblé Chez Jacqueline.

Jérémie Barbry et son orchestre
à Londres

Jérémie rencontra en Angleterre une charmante Dunkerquoise qui avait fui l'enfer de mai-juin 1940 sur l'Emile-Deschamps, navire qui sauta sur une mine près de Margate, le 4 juin. La jeune fille fut parmi les rescapés recueillis par un navire anglais. A sa sortie de l'hôpital, elle travailla dans une manufacture d'équipement pour l'armée.

Jérémie et Marie-Jeanne Fichaux décidèrent de se marier à Londres. Ils passèrent leur lune de miel à Manchester en même temps qu'un autre couple franco-anglais celui-ci. Les photos des jeunes mariés parurent dans les journaux anglais. La famille s'agrandit de deux petites Dunkerquoises nées sur le sol anglais en 1943 et 1944, puis un garçon né, lui, après la guerre et le retour à Dunkerque.

Le papa travailla aux Messageries Maritimes jusqu'à son départ en préretraite en 1976. Hélas, il décéda en 1977. Les "vieux dunkerquois" n'ont pas oublié que dans les années 50-60, Jérémie joua de l'accordéon Aux Loisirs, établissement que sa famille exploitait place Voltaire à Rosendael. La piste de danse n'était jamais déserte le dimanche, dans ce café-dancing populaire que Jérémie animait avec une simplicité qui lui valait l'amitié de toute la clientèle.

Serge Blanckaert
La Voix du Nord, 7 juillet 1996



(*) Jérémie a rapporté les disques 78 tours de sa prestation en 1943, gravés par la BBC, j'ai eu copie de ces enregistrements inédits par René Steylaers, historien dunkerquois.

au programme :

de l'accordéon (je recherche l'origine des javas)
- Dansons la java
- La java des gens du Nord
- Marche des accordéonistes Lyonnais
- Paris reine du monde
- Sous les ponts de Paris

et deux chansons de marins
- Pique la baleine
- Hardi les gars, vire au guindeau



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Jacques Yvart, dans sa chanson Dans la vallée des roses, se souvient du bal à Jérémie


en concert au USA


jeudi 14 janvier 2021

Un chanteur flamand à Saint-Omer au XIVe siècle

A partir de 1314 la comtesse Mahaut d'Artois s'installe à Charenton le Pont, où elle fait agrandir le château : construction d'une grande salle et d'une tour crénelée. C'est de cette époque que date ce livre de compte rédigé par Hue de Thélu, conservé aux archives départementales du Pas-de-Calais à Dainville. L'inventaire publié en 1878, a relevé divers joueurs d'instruments de musique :

1320 : Compte d'Hue de Thélu pour l'hôtel de la comtesse Mahaut du 7 août à la Toussaint

- a Simon le trompeur qui apporta lettres à madame du mariage Teri de Hensebergue le xxiiiime jour d'aoust à Saint-Omer … viii s.

- a Jehane qui geue des orgues … xvi s.

- a Perrot menestrel mons. de Boulogne qui geue du frestel … x s.

- a Terion menestrel de viele mons. de Chastillon … viii s.

Dans l'exposition "Musiques maestro !" présentée à Arras en 2011 était exposé ce parchemin des comptes et la notice précisait : le 9 septembre "à Saint-Omer à un chanteur qui chanta devant madame [la comtesse] en flament".


Archives départementales du Pas-de-Calais, cote A 386
photo personnelle

Jules-Marie Richard dans son livre paru en 2014, page 91, Mahaut comtesse d'Artois et de Bourgogne (1302-1329) nous donne aussi cette mention, parmi celles de plusieurs ménestrels qui se produisent devant la comtesse, le chanteur est gratifié de 12 deniers soit un sol, les autres musiciens mentionnés plus haut sont nettement mieux rémunérés : entre 8 et 16 sols.

dimanche 3 janvier 2021

La fête des rois en Flandre

mise à jour 25 octobre 2018 : deux photos signée Biebuyck 
mise à jour 16 décembre 2018 : photos de 1951, 1991 et 2009
mise à jour 14 janvier 2019 : deux vidéos
mise à jour 1 novembre 2020 : lien Rois Mages
mise à jour 2 janvier 2021 : Méteren 1947






filmés par Antoine Quaghebeur le 6 janvier 2019 à Saint Jans Cappel





un entretien avec les mêmes Rois et le témoignage de Maria Lapanne
qui a appris la chanson en suivant son père Maurice,
un des rois mages de Saint Jans Cappel, dans les années 1960.


 le fichier son est ICI




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Article paru dans Le Nord Illustré du 15 janvier 1910


"C’est une fête particulièrement populaire dans notre région où, malgré quarante ans de République, on tire encore les rois… Nous disons "malgré quarante ans de République" car sous l’Empire les billets du roi étaient jugés suspects, s’il faut en croire les très curieux "billets de l’Empereur" qu’il nous a été donné de voir récemment dans la collection de M. Pierre Decroix. On goûtera donc ce récit d’une des formes pittoresques sous lesquelles se présente la fête des rois en Flandre. Il est écrit par M. André Biébuyck, fils du distingué maire de Vieux-Berquin, et par conséquent bien placé pour connaître cette région fertile en vieilles coutumes.

Les Rois Mages à Meteren

Elles s’en vont, elles disparaissent, les bonnes vieilles coutumes qui firent la joie de nos pères. Le progrès les chasse, et bientôt elles n’existeront plus même à l’état de souvenir. En certains coins de Flandre pourtant, où la langue française n’a pas encore réussi à s’implanter complètement, il en subsiste quelques unes, derniers vestiges d’une époque moins prosaïque que la nôtre.
L’une d’entre elles se pratique encore annuellement lors de la fête de l’Epiphanie.
Ce jour là, le jour des Rois, s’en vont dans certains villages du canton de Bailleul, des jeunes gens aux costumes inattendus. Tout de blanc habillés, pantalon et chemise constellés d’étoiles de papier multicolores, coiffés d’un chapeau décoré de même et autour duquel pendent des dentelles, ce sont les "Rois Mages" qui s’en vont de porte en porte chanter l’antique complainte de l’Etoile de Bethléem. L’un d’eux tient au bout d’un bâton une roue ornée de fleurs et de rubans, qu’il fait tourner, à la grande joie des gamins qui les accompagnent. On les accueille avec plaisir les "Sterreken", et il n’est pas de maison, où ils ne reçoivent du pain, des gâteaux ou quelques sous. Ce qu’ils racontent, c’est l’histoire de la nativité et de l’arrivée à Bethléem des Mages conduits par l’étoile miraculeuse.

Avec l’étoile arrivèrent trois rois
De terres étrangères, de très loin

La traduction ne pourrait rendre que très imparfaitement la charmante simplicité de cette chanson. Certains couplets sont d’une naïveté délicieuse. Dans la crèche, la Vierge avec l’Enfant Jésus et Saint-Joseph sont mourants de faim alors…

Marie va dans la boulangerie
Achète un petit pain et le partage en trois

Et cela se chante sur un vieil air, composé en même temps que les paroles par quelque Liedzanger inconnu.

Aussi la traduction française ne s’adapte-t-elle que très imparfaitement à cette mélodie qu’il faut avoir entendu avec les accentuations rudes et gutturales d’une langue germanique pour en goûter tout le charme étrange.
Combien d’années encore verrons-nous les "Rois Mages" Le français gagne de jour en jour. Le flamand s’en va et avec lui les vieux usages qui y étaient trop intimement liés pour pouvoir vivre sans lui.
Si vous voulez voir les "Sterreken" allez à Meteren en Flandre le jour des rois."

Texte et photographie d’André Biébuyck

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J'ajoute ces deux photos signée Biébuyck, parues dans La France à Table, juillet 1951.



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Une autre image, capture d'écran de la télévision, de mauvaise qualité hélas, lors d'une série de diffusion de documents des années 1960 sur la télé régionale France3



les même rois mages que l'on retrouve en situation sur la route de Bailleul, en direction d'un lieu-dit prédestiné

collection Stéphane Verstaevel



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En 1991, Stéphane Deheegher, Alain et Claude Belpalme, "les derniers rois mages de Flandre flançaise" avaient repris le flambeau en 1985

Le Nouveau Nord, décembre 1991


En 2000, César Storet et ses amis de l'association De Katjebei relancent la tradition autour de Saint Jans Cappel

François, Florent et César
La Voix du Nord 29 décembre 2009


Une étude sur les chant des Rois Mages par Florimond Van Duyse (en néerlandais)

la tradition est aussi présente en Flandre Belge

source

collection personnelle

et à Bruxelles





cette année pas de quête pour les rois mages
la Voix du Nord, 3/1/2021

vendredi 1 janvier 2021

Adolphe Deprince, 1901-1995



Adolphe 9 ans
source : Charles Verstraete
Né "par accident" le 17 décembre 1901, à Malines (Belgique) chez sa grand-mère maternelle, il rentre à Roubaix dès janvier 1902. Il découvre l'accordéon auprès de son père, Emile né à Roubaix en 1872, qui joue du diatonique dans la Société des Joyeux Accordéonistes Roubaisiens. Adolphe en devient membre dès 1907. Son père l'encourage à apprendre le solfège et le piano au Conservatoire de Roubaix. En 1913 il apprend l'accordéon chromatique auprès de Lorion Perrin, dit P'tit Lorion. En 1921, pendant son service militaire au 110e RI, à Dunkerque, le chef de musique, le capitaine Eugène Hénon, découvre qu'il joue de l'accordéon et lui demande de jouer, lors d'un concert sur le kiosque d'Arras, la partie de flûte de la polka le Merle Blanc, mais le général Lacappelle n'apprécie pas l'instrument, il doit reprendre son saxophone. En 1924 à Calais, il épouse Adèle, fille de l'accordéoniste François Reubrecht et gérant du Café Moderne, rue des Thermes (voir plus bas) où il joue régulièrement. En 1932 il monte à Paris, invité par Fernando, accordéoniste chez Bousca, qui lui trouve du travail à Pigalle, à la Cigale en face du Cirque Médrano. Il n'y joue qu'une fois, le patron voulait un accordéoniste chanteur. Il trouve ensuite du travail aux Cascades, près du métro Anvers, c'est là qu'il compose pour la première fois, la mazurka Cascades. Puis il est demandé par les radios et fait ses premiers disques pour Parlophone, avec Fredo Gardoni son ami, qu'il remplace parfois dans le studio sans être mentionné sur les étiquettes "Un jour le directeur de Parlophone me fait écouter un disque de Gardoni, il me dit : voilà c'est comme ça qu'il faut jouer… et je ne pouvais pas lui dire que c'était moi qui l'avais fait". Il accompagne les innombrables chanteurs et chanteuses qui enregistrent chez Pathé Marconi, "quand il y a de l'accordéon, c'est moi" et joue aussi pour le cinéma, notamment dans La Belle Equipe, avec son ami d'enfance Marceau Verschueren, qui vient le rejoindre à Paris. Pendant l'occupation il joue dans les boîtes de nuit, de la musique à la demande. A la Libération il joue pour le grand bal sur la place de l'Hôtel de Ville puis il reprend le travail dans la brasserie Le Louis XIV, à la Porte Saint Martin, puis joue dans les guinguettes sur les bords de la Marne, Chez Max. La fin des brasseries avec orchestre et bal permanent après guerre, l'oblige à se reconvertir, il part sur les routes avec son orchestre pour proposer des bals. En 1948, il a l'idée de créer un numéro avec ses amis Louis Péguri, Médard Ferrero, V. Marceau et Deprince, ce sera Les Mousquetaires de l'Accordéon, avec un programme de musique classique : l'Ouverture de Sémiramis de Rossini, La Toccata de Vidor, etc. En 1970, après un infarctus, il est obliger d'arrêter les tournées, il se consacre alors aux concours d'accordéon. Le décès de son épouse en 1976 marque la fin de sa pratique musicale. Il meurt vingt ans plus tard le 26 novembre 1995 à Montreuil sous Bois.
Christian Declerck
31 décembre 2020


Adolphe (x) et ses parents, 58 rue de l'épeule
avec la casquette : P'tit Lorion
source : Charles Verstraete


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Adolphe Deprince, pionnier de « l'accordéon-musique », vient de mourir après avoir tout joué, des bals au music-hall, en passant par le cinéma. L'accordéon perd son Deprince.

Quand on lui demandait le secret de sa longévité, ses yeux se mettaient à pétiller: « J'ai toujours joué assis, jamais debout ». Adolphe Deprince, pionnier de « l'accordéon-musique », vient de mourir à son domicile de Montreuil-sous-Bois à 94 ans. Né en 1901, il est élevé à Roubaix où son père tient un café et dirige la clique municipale des accordéonistes. Très tôt, il lui met un accordéon entre les mains, mais l'encourage à prendre aussi des leçons de piano et de solfège. Il se lie avec un autre jeune prodige, Victor [sic] Marceau, l'ami de toute une vie. Dès les années 20, Deprince est musicien professionnel dans les brasseries : on ne vient pas pour danser mais pour écouter de la musique légère, voire des transcriptions classiques, à choisir sur un programme. A la fin des années 20, Deprince a déjà une belle réputation dans tout le Nord, Victor [re sic] Marceau le fait monter à Paris. Il est l'accordéoniste attitré de Pathé : quand les autres travaillent à l'oreille, «à la feuille», lui peut déchiffrer une partition à vue. Il accompagne les grands interprètes de chez Pathé. Sans parler des films : dans la Belle Équipe c'est lui qui joue lorsque Gabin chante Quand on s'promène au bord de l'eau.

Deprince s'installe à demeure au Balthazar, une brasserie près de la République. La radio le rend populaire, il signe une floppée de disques. Il distribue gratuitement ses compositions aux orchestres de bal en se payant sur les droits d'auteur. Evoquant les partitions de celui qu'il appelle le « Paganini de l'instrument », Marcel Azzola dit qu'elles sont peu jouées car sous leurs airs légers, elles exigent des doigts aguerris. En 1945, c'est Adolphe Deprince qui anime le bal de la Libération, place de l'Hôtel-de-Ville. La France est avide de fête. Avec son orchestre, il va sillonner le pays pour faire danser. Mais en même temps, il continue de défendre « l'accordéon musique » aux côtés de V. Marceau et d'un autre grand accordéoniste et pédagogue Médard Ferrerro : ils lancent un quatuor les Mousquetaires de l'accordéon qui impose dans les music-hall et en attraction des grands cinémas l'idée que l'accordéon peut être un instrument noble. Adolphe Deprince a arrêté les bals au début des années 70. Il continuait de présider les jurys de concours d'accordéon, capable de s'émerveiller des qualités de jeunes recrues, mais aussi de disqualifier le travail bâclé ou le manque de sentiment : «Il faut le dire, le plus important, c'est là», disait-il en se frappant le coeur. Avec Deprince, on est loin du folklore de l'instrument, les guinches à marlous, à putes, ou du milieu : acharné au travail, exigeant envers lui-même, ce vrai musicien a toujours été attaché à faire ressortir les qualités musicales de son instrument ; Jean Wiéner ou Georges Auric ne s'y trompaient pas qui le faisaient travailler pour leurs musiques de films.

Hélène HAZERA

Libération, décembre 1995



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Entretien avec Hélène Hazera 

France-Culture, 18 janvier1992

Avec Marcel Azzola et Yvette Horner

On y entend : Joyeux Canari (1951) ; Railway, valse (1938) ; Réveillon Java (1937) ; Après l'orage, polka (1951) ; Edelweiss, valse ; L'amour des hommes, par Fréhel ; Quand on s'promène au bord de l'eau, par Jean Gabin ; Jocelyne, fox-trot ; Ah ! Retrouver Paname, par Jeanne Chacun (1945) ; L'Ouverture de Sémiramis de Rossini, par Les Mousquetaires de l'Accordéon (enregistrement de travail) et Princesse Musette.

téléchargez ICI


une rencontre avec son ami Marcel Azzola (1992)





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un document rare, vers 1925

le Café Moderne à Calais
avec François Reubrecht fils à l'accordéon,
et au jazz, Adèle Reubrecht, épouse d'Adolphe
collection personnelle


Quelques exemples de ses compositions







Deprince et son orchestre, avec sa nièce Simone Bultiauw
source : Charles Verstraete