jeudi 27 mai 2021

V. Marceau, les débuts à Lille

Marceau Vershueren en 1909
pastel ? de P. Roelens en 1921
coll. Eric Verchueren


Il est connu sous ce pseudonyme, V. Marceau et certains, mal informés, l'appelle même Victor. Mais son prénom est bien Marceau, né Marceau Georges Verschueren à Liévin en 1902, cité du n°11. Ses parents ont des origines flamandes entre Gand et Anvers. Le père, Alexandre Louis, est né à Lille en 1869, fils naturel de Stéphanie née à Lokeren et sa mère Maria Strobbe est née en 1877 dans un petit village très proche, Sinaai. Ils se sont mariés à Lokeren en 1901, lui est cordonnier, elle est ouvrière de fabrique, ils résident tous les deux à Lokeren. Qu'est-ce qui a poussé Alexandre à quitter son pays pour s'installer à Liévin l'année suivante ? je ne sais pas.

En ce début de siècle l'accordéon est en plein développement, autour de Roubaix, Lille ; de nombreux musiciens apprennent cet instrument populaire qui semble si facile, des orchestres et des harmonies se forment, Charles Verstraete en a fait l'historique dans un superbe livre, très bien documenté où l'on découvre Alexandre jouant sur un superbe Solari posant avec son fils en 1910 (photo). C'est avec ce diatonique allemand, que dès 7 ans et demi, il va accompagner les marionnettes de Louis De Budt, alias Louis Poire Cuite, mais très vite on lui offre un meilleur instrument. On découvre sur ces photos (voir en bas de page) les différents accordéons de Marceau, je remercie Eric Verschueren, petit-fils de Marceau, qui m'a autorisé à diffuser ces rares photos de sa collection familiale. Heureusement Marceau avait l'esprit collectionneur, il a conservé ces documents, les a datés, et certains sont commentés. Comme celui où il pose avec un groupe de musiciens des rues, un épisode totalement inconnu du parcours musical de Marceau. Grace à ses notes on connait leurs noms, et j'ai pu retrouver ces musiciens, dont trois sont membres de la même famille, l'aîné est Henri Lestarquit (né en 1890), il est le frère de Jules déjà étudié ici, à gauche son demi-frère Léon (1907-1979) et sa demi-sœur Martha (1898-1981) Van Neder. Je n'ai pas encore identifié la chanteuse Marthe Delzenne. C'est en 1924 que cesse sa participation au groupe, c'est aussi l'année du mariage de Martha et celle du second mariage d'Henri, ce n'est sans doute pas une coïncidence.

collection Eric Vershueren

Avant de jouer avec ces musiciens de rue, Marceau s'est distingué dans de nombreux concours. En 1914 il obtient une mention spéciale au concours de Denain, on apprend par la presse qu'il est alors domicilié à Fives, il obtient aussi des médailles à Mons et à Iseghem. En 1923 il obtient une "haute distinction" au concours de Liège. Au début des années 1920 il s'équipe d'une basse aux pieds, fabriquée par Solari à Bruxelles, toujours conservée dans la famille.

L'arrêt du groupe de musiciens ambulants le pousse certainement à chercher d'autres moyens de subsistance. Le 28 janvier 1924 il se produit en soliste parmi des attractions au Théâtre des Ambassadeurs (l'ex Palais d'Eté) situé à Lille au milieu du square Dutilleul, près du quai du Wault. L'année 1925 marque ses vrai débuts professionnels, à la Taverne Lilloise (photo), rue de Béthune, avec son orchestre, il y rencontre une jeune dactylo et l'année suivante Marceau épouse Paule Hennebois, née à Lille en 1903, fille d'un employé de la Bibliothèque Universitaire. Elle sera sa parolière sous le pseudonyme de Paule Delyl. En 1927 il continue, toujours dans la rue de Béthune, à la brasserie du Théâtre des Variétés, au n°21. La même année son premier grand prix d'honneur au concours de Wasmes est remarqué par le Grand Echo du Nord, ce qui le fera sans doute entrer dans le monde artistique lillois, car en février 1928 il participe à la revue Perd pas l'Nord, présentée à l'Alhambra, toujours dans la rue de Béthune. il y joue le rôle d'un poilu accordéoniste dans une scène du deuxième acte Les gars du Nord aux tranchées avec, entre autres, Clérouc, le scénariste de la revue et déjà Bertal, le chanteur lillois alors débutant. C'est probablement grâce à sa participation à cette revue qu'il fait la connaissance de Léopold Simons qui a écrit une scène pour le premier acte : Victime du poste à galène, jouée par Line Dariel. Ce sera le début d'une longue amitié entre les deux artistes. Ils se retrouveront sur scène en 1933 pour la pièce de théâtre écrite par Simons Le mystère du 421. En juillet 1928, le chanteur et auteur lillois Pierre Manaut passe sur l'antenne de Radio P.T.T. Nord, il chante sa chanson Moi aussi, "musique de notre concitoyen le compositeur Marceau Verschueren." précise Le Grand Echo. En 1930, l'orchestre de Marceau se compose de Germaine Van Caillie-Giblet au piano,  Gustave Van Caillie au violon, son époux  et André Francens au jazz.


l'orchestre de V. Marceau en 1927
André Francens à la batterie, Gustave Van Caillie au violon
et Odette, amie de Gustave, au piano
collection Eric Verschueren


vers 1930 l'orchestre Marceau, Germaine Giblet au piano
 épouse de Gustave Van Caillie au violon
André Francens à la batterie
collection Eric Vershueren


A la même époque, Marceau ne se contente plus de jouer, il est aussi compositeur et naturellement il édite ses partitions qui sont illustrées par son ami Simons. Voient ainsi le jour les futurs succès : La Marche des accordéonistes Lyonnais, Volupta, Tarragone, Ça Gaze, etc. Deux adresses sont mentionnées pour ces premières éditions Marceau : 33 rue des Tanneurs et 2 rue Roland. on peut les dater entre 1928 et 1933 d'après les signatures de l'illustrateur. Leurs dédicaces nous révèlent les amitiés de Marceau : Henri Lestarquit, le chanteur populaire, compagnon des temps difficiles ; Harry Revertégat, le chef d'orchestre du Casino de Lille ; Lucien Gautier, violoniste ; Mr et Mme Rucart, les chanteurs lillois ; Graziella Sabatier, accordéoniste ; Maurice Desmet, accordéoniste ; Marius Brusorio, chef d'orchestre ; Gustave Xallez, trompettiste et drummer ; Maurice Frangville, aussi drummer ; Emile Huet, président de l'Etoile Lyrique de Bruay ; Auguste Allerad, accordéoniste et bien entendu Marcel Wiedaghe, l'accordéoniste attitré de Radio P.T.T. Nord. 1928 c'est aussi l'année de ses premiers disques qu'il enregistre sous le label F. Henry vers septembre/octobre deux 78 tours : Au pays de l'Indoustan / Tarragone, et Moi aussi / Miss Columbia, accompagné par un joueur de banjo inconnu nommé Jeangot, qui sera plus connu comme guitariste de jazz par la suite : Django Reinhardt. Les disques sont mis sous presse par Pathé les 5 et 12 décembre 1928.

source Gallica

Le 31 mai 1929, un article paru dans le Grand Echo du Nord nous annonce la venue à Lille du compositeur du grand succès de l'époque : Sur un marché persan. Albert  Ketèlbey est invité par Léon Coupleux et l'association de Radiophonie du Nord pour un concert où il dirige ses œuvres. Parmi les personnalités citées dans l'article, Marceau Verchueren est conseiller technique de la commission artistique chargée d'accueillir le compositeur. En 1930, d'après Roland Manoury, Marceau est appelé à Paris par la société Odéon pour enregistrer Ça gaze et Volupta. Marceau est encore lillois pendant quelques années. Il continue de jouer dans la rue de Béthune, notamment au Capitole, avec son ami Gustave Van Caillie. Cela dure pendant deux ou trois ans puis Marceau décide de quitter sa région pour la capitale, où les opportunités professionnelles seront plus nombreuses, mais cela déborde du cadre de ce blog.

Christian Declerck
27 mai 2021


Quelques unes des photos de la collection d'Eric Verschueren :










1925 - 1926 - 1927


Quelques exemples des éditions lilloises de V. Marceau


collection personnelle

et chez Eden Editions





lundi 17 mai 2021

Faits et usages des flamands de France

Par Raymond de Bertrand (1802-1864)


"Cette étude, écrite en 1863, est pour ainsi dire inédite, car nous ne croyons pas qu'elle ait jamais parue en livre ou en fascicule ; les détails qui nous sont donnés sur la vie d'autrefois seront certainement bien accueillis par les Dunkerquois de nos jours" (Bulletin de l'Union Faulconnier, 1906)






Sommaire
- Disparition du flamand
- Les clinqueurs
- Les pannekoeken
- Les koeke-baks à Lille, Roubaix, Tourcoing
- Les pannecouques à Gravelines
- Derniers fabricants de pannekoeken à Dunkerque
- Les tablettes de sucre
- Dernières annonces en flamand
- Affiches électorales en flamand
- Enseignes flamandes à Dunkerque
- Enseignes bizarres à Dunkerque
- Les jeux à Dunkerque
- Ecoles françaises
- Cris de la rue en flamand
- Utilité du flamand
- Comité Flamand de France
- Danse flamande à Dunkerque — Le Roosenhoed [chanson utilisée par Jules Massenet dans son œuvre Rosati, divertissement pour orchestre composé en 1901]
- Disparition des chansons flamandes
- Le jeu à la corde
- Les minnen
- Carnaval
- Chanson des corsaires
- Chanson flamande contre Napoléon
- Les chansons du carnaval (suite)
- Carnaval de 1840
- Carnaval de 1847
- Fêtes de 1848 [inauguration du chemin de fer]

Les fêtes de septembre 1848

- Carnaval de 1854 — Docteur Salvalavita
- Carnaval de 1856
- Carnaval de 1857
- Carnaval de 1861
- Le jeu au temps du Carnaval
- La mendicité à Dunkerque vers 1820
- Sœurs de l'Enfant Jésus (1828)
- Caisse d'Epargne (1834) — Salle d'asiles (1834-1835)
- [Sociétés charitables]
- Carnaval de 1863
- Classe ouvrière à Dunkerque
- Les cabarets
- Dernières pancartes flamandes à Dunkerque
- Canneel-kouke
- La folhuys
- Papiere lanterne [cabaret]
- Bottes de paille devant les maisons mortuaires
- Tentures mortuaires en 1855 — Premier corbillard (1857)
- Toilettes des deuillants — Chapeaux et manteaux
- Enterrement des décorés — Décharges de mousqueterie
- Sonnerie des cloches aux fêtes des doyens
- Service pour enfants de la classe aisée
- Billets de morts
- La Saint-Martin
- Petites lanternes — Allumettes chimiques
- Superstitions :
- Le fer à cheval
- Le vendredi
- Le numéro 13
- Le collier d'olives d'ivoire
- Treize à table
- Objets en croix
- Jour néfastes
- Le feu qui siffle — La chandelle qui forme un rond
- Le loup-garou [den nikker]





lundi 10 mai 2021

Des brevets de danse militaires




Didier Lhotte a publié en 2020 un superbe livre contenant la reproduction d'une soixantaine de brevets de danse français du XIXe siècle (1808 à 1884). voir ICI

Parmi eux ont découvre avec plaisir la présence de quatre brevets originaires de notre département : Bergues, 2 de Maubeuge et Avesnes sur Helpe, avec un relevé des noms des signataires :

Bergues, le 26 juillet 1831 ; maitre de danse : Charles Désiré DUCLOS, signatures : Dlalleau, Delhomme, Déléclus, Mourié, Pénau, Destié (coll. Chant et Danses de France)

Maubeuge, le 9 mars 1834 ; prévot de danse : Egance ROUSSELET, signatures : Delaler, Piero, Faye, Marette (coll. Jean-Marie Bruson)

Maubeuge, le 12 décembre 1838 ; prévot de danse : Coltier Lambourd, signatures : Chainot, Boulanger, Baret, Balblan, Chevallier, Delorme, Sornay, Buvaux, Demouchi (coll. Chrisitian Roca)

Avesnes, le 25 janvier 1846 ; prévot de danse : PALLART, signatures : Sacy, Gomiot, Chevrolat, Laitiny, (coll. Alain Jourdan, la Capouliero de Martigues)


Plus d'infos sur la danse de caractère adoptée par les militaires ICI


L'enseignement militaire de la danse  et les traditions populaires, par Hélène et Jean-Michel GUILCHER, Revue des Arts et Traditions Populaires, 1970






Une affiche de recrutement à Douai vers 1784
à droite, démonstration d'un maître de danse au camp d'Helfaut (62) en 1853