Adolphe 9 ans source : Charles Verstraete |
Adolphe (x) et ses parents, 58 rue de l'épeule avec la casquette : P'tit Lorion source : Charles Verstraete |
Adolphe Deprince, pionnier de « l'accordéon-musique », vient de mourir après avoir tout joué, des bals au music-hall, en passant par le cinéma. L'accordéon perd son Deprince.
Quand on lui demandait le secret de sa longévité, ses yeux se mettaient à pétiller: « J'ai toujours joué assis, jamais debout ». Adolphe Deprince, pionnier de « l'accordéon-musique », vient de mourir à son domicile de Montreuil-sous-Bois à 94 ans. Né en 1901, il est élevé à Roubaix où son père tient un café et dirige la clique municipale des accordéonistes. Très tôt, il lui met un accordéon entre les mains, mais l'encourage à prendre aussi des leçons de piano et de solfège. Il se lie avec un autre jeune prodige, Victor [sic] Marceau, l'ami de toute une vie. Dès les années 20, Deprince est musicien professionnel dans les brasseries : on ne vient pas pour danser mais pour écouter de la musique légère, voire des transcriptions classiques, à choisir sur un programme. A la fin des années 20, Deprince a déjà une belle réputation dans tout le Nord, Victor [re sic] Marceau le fait monter à Paris. Il est l'accordéoniste attitré de Pathé : quand les autres travaillent à l'oreille, «à la feuille», lui peut déchiffrer une partition à vue. Il accompagne les grands interprètes de chez Pathé. Sans parler des films : dans la Belle Équipe c'est lui qui joue lorsque Gabin chante Quand on s'promène au bord de l'eau.
Deprince s'installe à demeure au Balthazar, une brasserie près de la République. La radio le rend populaire, il signe une floppée de disques. Il distribue gratuitement ses compositions aux orchestres de bal en se payant sur les droits d'auteur. Evoquant les partitions de celui qu'il appelle le « Paganini de l'instrument », Marcel Azzola dit qu'elles sont peu jouées car sous leurs airs légers, elles exigent des doigts aguerris. En 1945, c'est Adolphe Deprince qui anime le bal de la Libération, place de l'Hôtel-de-Ville. La France est avide de fête. Avec son orchestre, il va sillonner le pays pour faire danser. Mais en même temps, il continue de défendre « l'accordéon musique » aux côtés de V. Marceau et d'un autre grand accordéoniste et pédagogue Médard Ferrerro : ils lancent un quatuor les Mousquetaires de l'accordéon qui impose dans les music-hall et en attraction des grands cinémas l'idée que l'accordéon peut être un instrument noble. Adolphe Deprince a arrêté les bals au début des années 70. Il continuait de présider les jurys de concours d'accordéon, capable de s'émerveiller des qualités de jeunes recrues, mais aussi de disqualifier le travail bâclé ou le manque de sentiment : «Il faut le dire, le plus important, c'est là», disait-il en se frappant le coeur. Avec Deprince, on est loin du folklore de l'instrument, les guinches à marlous, à putes, ou du milieu : acharné au travail, exigeant envers lui-même, ce vrai musicien a toujours été attaché à faire ressortir les qualités musicales de son instrument ; Jean Wiéner ou Georges Auric ne s'y trompaient pas qui le faisaient travailler pour leurs musiques de films.
Hélène HAZERA
Libération, décembre 1995
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Entretien avec Hélène Hazera
France-Culture, 18 janvier1992
Avec Marcel Azzola et Yvette Horner
On y entend : Joyeux Canari (1951) ; Railway, valse (1938) ; Réveillon Java (1937) ; Après l'orage, polka (1951) ; Edelweiss, valse ; L'amour des hommes, par Fréhel ; Quand on s'promène au bord de l'eau, par Jean Gabin ; Jocelyne, fox-trot ; Ah ! Retrouver Paname, par Jeanne Chacun (1945) ; L'Ouverture de Sémiramis de Rossini, par Les Mousquetaires de l'Accordéon (enregistrement de travail) et Princesse Musette.
téléchargez ICI
une rencontre avec son ami Marcel Azzola (1992)
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le Café Moderne à Calais avec François Reubrecht fils à l'accordéon, et au jazz, Adèle Reubrecht, épouse d'Adolphe collection personnelle |
Deprince et son orchestre, avec sa nièce Simone Bultiauw source : Charles Verstraete |
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