vendredi 7 novembre 2025

Maurice Cornette, souvenirs d'un musicien

mise en ligne le 20/10/25
mise à jour le 6/11/25 : la vidéo ne l'affichait plus avec Firefox, j'ai ajouté un lien direct
mie à jour le 7/11/25 : ajout d'une photo et un recueil de partitions


En 1983, l'association Het Reuzekoor publie dans sa revue Plach'iou, un entretien avec Maurice Cornette, musicien coudekerquois né en 1895. Il a connu le Dunkerque d'avant les deux guerres, pratiqué toutes les musiques : harmonies, accompagnement de films muets, concerts dans les cafés du centre ville et de la plage, bals dans les même lieux et après les bandes de carnaval. Dans le même temps, il était professeur à l'école de musique de Coudekerque-Branche. Il nous livre un témoignage unique et très détaillé sur sa pratique, ses rencontres, et l'ambiance de cette "belle" époque.
 
L'article est intéressant, mais le plus intéressant c'est son entretien, enregistré sur cassette par Maryse Collache qui a été conservé par l'association. Ce qui permet de compléter le texte. On a en prime les interventions de sa fille Odette et de son beau-fils, Roger Deblock, qui complètent sa mémoire parfois défaillante.
Maurice nous parle de son apprentissage du solfège en 1906, avec un voisin, Lucien Dimanche (1880-1955), petit neveu de Stéphanie Dimanche, plus connue sous son surnom de Manootje. Il intègre rapidement la société des Amis Réunis de Coudekerque-Branche, concurrente de l'harmonie catholique (surnommée les Blincke Piche).
Puis ses qualités de bon musicien le font embaucher dans les cirques qui s'installent pour un mois chaque année en janvier sur la place Jean-Bart : Le cirque Palisse, le cirque Pourtier et le cirque De Jonghe. Il se fait donc remplacer chaque année de son emploi de trombone solo à l'orchestre du théâtre de Dunkerque pour jouer dans l'orchestre du cirque. Il est musicien au théâtre d'octobre à mars, sauf en janvier, ce qui lui fait un second emploi que lui reproche son chef de service (il est employé de la société du gaz). Il est membre des artistes musiciens de Dunkerque de 1921 à 1979.
Il accompagne tous les ans les conscrits après le conseil de révision, pour une tournée des bistrots, salles de bals et maisons closes de Dunkerque et sa région. Son expérience de musicien formé au cirque lui permet d'être embauché dans les cinémas, il faut s'adapter très vite au déroulé de l'action comme au cirque. Il débute au cinéma l'Aviation rue de la Gare à Coudekerque-Branche, puis au Palais Jean-Bart, place de la République à Dunkerque et aussi au Royal Cinéma, place Jean Bart.
L'hiver il joue dans l'orchestre du théâtre, mais aussi au café des Arcades puis l'été il joue dans l'orchestre du café Belle Vue sur la plage de Malo les Bains avec ses amis des Arcades : René Cordier, le pianiste et chef d'orchestre, Marcel Périn, au violoncelle, Arthur Dehon et Louis Dondeyne, aux violons, Fernand Canpon à la trompette et Maurice au trombone.
Il n'a pas joué dans les bandes de carnaval, mais surtout dans les bals, et principalement le grand bal masqué du théâtre. Dans les années 1970 il est sollicité par son petit-fils Michel Deblock pour apprendre le solfège à ses amis musiciens du carnaval qui viennent de former le groupe Les Kakesteks avec Roch Vandromme, mais c'est une autre histoire…

la vidéo que j'ai réalisée à partir de l'enregistrement est ICI



 
photo Jean-Charles Bayon (1980)
 
*****
 
Merci à Roch pour cette rare photo des Kakestecks prise à la patinoire de Dunkerque, à la fin des années 1970. 
On y voit : (1) "Moustique", [qui se souvient de son vrai nom ? il a tenu un café à Coudekerque Bche sur la place de la République] ; (2) Patrick Truquet ; (3) Gérard Truquet ; (4) Yves Autret ; (5) Gilles Allaert ; (7) Jean-Luc Thienpoent ; (8) Antoine Delbende ; (9) Yves Buffet ; (11) Stéphane Deconinck ; (12) Roch Vandromme ; (13) Maurice Cornette ; (14) Claude Devos ; (15) Yves Ardaens ; (16) Michel Deblock


Roch m'a aussi confié ce recueil manuscrit de musique, rédigé par Maurice Cornette pour ses "élèves", on y retrouve sans doute les airs qu'il jouait dans les cafés et les bals avant guerre, mais aussi et surtout quelques airs du carnaval dunkerquois.
- Le Moulin de Suzette, one step
- La Caissière du grand café, scottisch
- Frou Frou, valse
- Le Téméraire, marche
- Rose Marie, marche
- Indicatif,  marche
- Marie je t'aime, Et quand on s'aime, marche
- Trinck, Trinck, Brederlein Trinck, valse
- Le Corso blanc, scottish ou polka
- La Valse brune
- Quelques airs dunkerquois : On dit qu'Dunkerque est mort, Ah ! ce qu'il a l'air bête, Met ton p'tit cul sur la glace, Manotje, Pêcheurs d'Islande
- Quelques airs connus : Y'a des loups, Toutes les f...., N'achète plus d'allumettes, J'aime le jambon et la saucisse
- Les Pierrots, marche
- 14 juillet, marche
- Le Frisé, marche
- Ouiche Ouiche, marche
- La Petite Tonkinoise, scottisch
- Caroline, one step
- Tant qu'il y aura des coqs dans un village, il y aura des poules à surveiller, one step
- Dans les jardins de l'Alhambra, scottisch
- Le Petit chapeau tyrolien, one step
- Trou la la itou !




mercredi 5 novembre 2025

Le répertoire du carnaval à Dunkerque


photo Bernard Cartiaux

Le répertoire du carnaval et sa transmission
mémoire de fifre

Intervention à la journée d’étude participative du vendredi 24 novembre 2023 au MTVS de Fourmies, colloque sur les appropriations créatives concernant les MUSIQUES POPULAIRES DES HAUTS-DE-FRANCE, journée organisée par Sophie-Anne Leterrier de l’Université d’Artois, dans le cadre de l'expo Musiques en pièces

programme

Le carnaval de Dunkerque est une fête traditionnelle, depuis longtemps très enracinée, aujourd’hui très médiatisée, qui ne cesse d’évoluer, de se transformer, par les appropriations créatives aussi bien collectives qu’individuelles, propres à ce type de manifestations traditionnelles non strictement codifiées.

Ce carnaval recouvre la traditionnelle Bande des pêcheurs (vischerbende), ses répertoires fifres et fanfare (cuivres), les chansons qui y sont chantées et le parler Dunkerquois qui donne une saveur particulière à ses chansons.

Son enracinement – Sa malléabilité

Rapide historique.
Du carnaval au XVIIe et au XVIIIe siècle, on ne sait quasiment rien si ce n’est qu’il était déja très prisé. Au XVIIIe siècle, l’évocation des discussions des autorités diverses pour savoir quoi faire pendant les périodes de guerre ou de troubles comme pendant la Révolution, nous montre clairement que la détermination des Dunkerquois à faire, en toutes circonstances, le carnaval, pèse lourd dans les diverses prises de décisions (J. Denise, Carnaval Dunkerquois, page 18 et 19) Comme à cette période le carnaval en soi n’est pas documenté, a fortiori, nous ne savons presque rien des pratiques et n’avons aucun document graphique ni partition musicale.
C’est au XIXe siècle que nait l’intérêt porté à ce genre de manifestations. La documentation sur le sujet s’enrichit donc énormément. Nous en retiendrons que dans la première moitié du siècle, c’est la vischerbende qui prend le dessus et devient la figure de proue du carnaval.
Dans la deuxième moitié, la langue flamande perdant du terrain, le carnaval change de langue. On assiste donc à la création progressive d’un nouveau répertoire en français.
Au XXe siècle, il y a une interruption pendant la guerre1914-18, puis un redémarrage progressif. En 1927, la bande prend un nouveau visage avec l’adjonction de la fanfare à la traditionnelle clique de fifres et tambours qui, depuis le début, menait la “troupe”. Cette nouveauté fait suite à plusieurs tentatives en ce sens, qui furent diversement appréciées. La “ bande” se passe depuis lors en deux moments dictincts : la marche avec les fifres, le chahut avec les cuivres.
 
Arrêt durant la guerre de 39-45.
En 1946, redémarrage, grâce à un groupe d’inconditionnels qui parcourra, en chantant, les rues de la ville en ruines !
 
Notre Carnaval à Nous
Dans les années 70, dans une période qu’on qualifiera de favorable, (régionalisme, défense des langues et patrimoines locaux), nous nous réapproprions à notre tour, le carnaval. Le carnaval, tel qu’il était dans les années 60, était extrêmement bon-enfant, toutes classes d’âge confondues. Les enfants faisaient la ronde à deux pas de la musique, sans danger !
Le répertoire musical était limité au répertoire ancien, sans nouvelles créations, les musiciens nous jouaient en nouveautés, des airs à la mode, sans paroles dunkerquoises (ex : le P’tit chapeau tyrolien, le Travail c’est la santé, Yellow Submarine, etc.)
 
Il était temps de faire bouger un peu les choses !
En 1974, se créent les Kakestecks, fanfare indépendante, que je m’empresse de rejoindre. Les instrumentistes, pour la plupart novices, qui la composent, n’ont d’autre but que de prolonger la fête, en créant d’abord une après-bande à Dunkerque et une avant-bande à Malo, puis les avant et (ou) après-bandes à Dunkerque, Malo, Rosendael...
Peu de temps après, en 1977, à l’initiative de Jean DENISE, avec Jean Chatroussat, Jean Wispelaere, Serge Blanckaert, et moi même, est effectué un travail de recherche et de collectage pour l’ouvrage Les enfants de Jean Bart, édité par Les Corsaires Dunkerquois.
Dans la foulée, Jean Denise crée sa propre maison d’édition, Westhoek Éditions, pour promouvoir des ouvrages à vocation régionale, et édite en 1979, le disque “Dunkerque en Flandre” avec le Pot-pourri du carnaval dunkerquois par les Kakestecks.
Nous (les Kakestecks) profitons de ce qui a été retrouvé pour élargir les répertoires anciens et par les avant et après-bandes, nous réintroduisons les mélodies et airs divers qui nous plaisent.
Derrière nous se regroupent des carnavaleux fervents qui sont de plus en plus nombreux et qui deviennent les Indépendants (par opposition aux associations philanthropiques et carnavalesques).
Dans les années 80, dans un esprit similaire, mais d’avantage tournés vers les “chapelles”, se créent Les Prouts, qui vont formidablement renouveler le répertoire chanté.
Pour compléter le tout, il faut noter aussi, à partir de ces années, le changement qui s’est opéré au sein même de la fanfare “officielle” où, grâce à des “chefs de bandes”, notamment Christophe Denys à Dunkerque, le répertoire s’est considérablement enrichi. Très à l’écoute de ce qui se passait, soucieux de ne jouer que du répertoire à texte dunkerquois, il a porté de nombreuses créations nouvelles dans le répertoire de la bande. Ce phénomène toucha également et très vite les autres musiques, celle de Saint-Pol-sur-Mer en tout premier lieu.
 
En 1991 – Guerre du Golfe et annulation du Carnaval
La “Bande Annulée.”
La mouvance indépendante (Kakestecks et Indépendants), très vite rejointe par des musiciens “officiels” et des “chefs de bandes”, organise de bout en bout un carnaval non officiel, très bien relayé par La Voix du Nord, et prouve ainsi l’indépendance des Dunkerquois et leur attachement à cette fête. Un précédent est créé ! En 2022, pour cause de Covid, une interdiction préfectorale (suivant celle de 2021) est décrétée. Les carnavaleux encore une fois, outrepassent l’interdit. En ces deux occasions particulières on peut encore parler de réappropriation collective, tout se passant sans le concours des municipalités et même en opposition à leurs décisions !
 
Le Répertoire
En quoi consiste le répertoire chanté ? Comme nous l’avons vu, le répertoire initial était en Flamand. Nous en avons quelques traces dans l’ouvrage d’Edmond De Coussemaker, “Chants populaires des Flamands de France” (1853). On notera la stricte séparation des répertoires : le carnaval et les chansons maritimes. En ce qui concerne les chansons de carnaval, il s’agit de chansons comiques et de genre, une dizaine si on compte en plus de celles qui sont clairement répertoriées, celles notées en 1857 dans un fascicule carnavalesque, (probablement rédigé par Alfred Morel), édité pour une bonne oeuvre et pour remettre en tête des Dunkerquois, quelques chansons en Flamand. Ce répertoire chanté était évidemment joué par les fifres. Seuls l’air du Reuze et celui du Carillon de Dunkerque, sont encore joués. Restaient, il y a quelque temps, quelques bribes d’autres chansons en flamand, mais elles ont disparu ces dernières années. On notera l’inventivité collective: ainsi “kom nie mee na boven” (en Flamand, “viens avec moi là-haut”) devient “comme elle est belle la bande”!
Entre la fin du second empire et la première guerre se crée donc tout un nouveau répertoire en Français, répertoire chanté et joué en période de carnaval (mais pas nécessairement dans la bande elle-même). La fanfare municipale participe aux festivités, (tout comme le carillonneur) mais n’est pas directement en lien avec la bande.
Elle joue un répertoire dit “de carnaval “. Ce nouveau répertoire est constitué de :
- Créations anonymes ou collectives, sur base d’airs militaires ou autres.
- Créations dues à des chansonniers dunkerquois (H. Bertrand, le plus connu, et bien d’autres)
- Airs à la mode dans la France de l’époque (Vincent Scotto et autres).
A partir de 1927, le répertoire se scinde plus clairement avec l’adjonction définitive de la fanfare à la bande elle-même. Il en résulte :
- un répertoire de fifre (qui semble être un peu réduit ), pour la marche.
- un répertoire de cuivre pour le “chahut” ou “Tiens bon d’sus”.
Et parfois un air lent, joué par la fanfare (Donne un zô, Manotje, éventuellement, Elle travaille à la Filature. )
Une bonne partie de ces répertoires existe toujours et constituait l’essentiel de l’héritage qui nous est parvenu après la seconde guerre mondiale.
Depuis les années 80, comme je l’ai déjà mentionné, la tradition de la chanson dunkerquoise est remise à l’honneur en premier lieu par les Prouts. Elle poursuit l’oeuvre des chansonniers, qui avait déjà elle-même trouvé des successeurs : on se souvient de Jean Chatroussat, Jean Wispelaere, Jean Jaecques avec leurs petits carnets de chansons !
Il est important de noter que pour avoir sa place au carnaval, toute chanson se doit (à quelques exceptions près) d’avoir un texte avec un minimum de “parler” dunkerquois.
Le premier auditoire des Prouts fut celui des “chapelles”, puis des cafés. Mais c’est avant tout par le disque qu’ils se font connaître. Et aussi par la scène.
Les disques de carnaval existaient depuis la 2e guerre mondiale, mais il ne s’agissait alors que de disques d’ambiance, où se jouaient des pots pourris, plutôt dans l’esprit des bals, avec chanteurs à la voix d’opérette, n’ayant pas d’accent dunkerquois, et avec un tempo accéléré.
Les Prouts interprètent des chansons de leur cru, sur des musiques souvent originales mais aussi sur des airs connus de leur choix. Leurs sujets prêtent souvent à rire et les paroles sont d’un “dunkerquois” à toute épreuve, j’entends par là le langage et les tournures ! Certaines de ces chansons sont rentrées dans le répertoire de la bande bien que n’étant pas forcément créées pour cela. D’autres chansons ont aussi été créées par des auteurs anonymes ou clairement identifiés, enrichissant ainsi énormément le répertoire global du carnaval.
 
Thèmes généraux des chansons du carnaval actuel
Bien que la bande soit nommée “des pêcheurs” on ne peut pas dire que la vie de marin ou la pêche soient de fait un sujet central. Dans le vieux répertoire, comme dans l’actuel, les thèmes comiques sont toujours de mise avec bien sûr les railleries sur les femmes, (ou certaines fois des versions inversées), sur le mariage, l’amour, etc. Des figures locales, bien sûr, peuvent être évoquées/célébrées et puis des chansons (comme souvent) sur tout et n’importe quoi 
 
Thème de la pêche à Islande
Bien que le carnaval originel et la pêche à Islande n’aient pas de véritable lien entre eux, la croyance quasi générale est que la fête pour-boire (foye) que faisaient les pêcheurs à Islande avant l’embarquement, est à l’origine de la Bande des pêcheurs. Le répertoire ancien du carnaval est sur ce sujet quasi inexistant sauf : Donne un Zô , Ah! c’ qu’elle est courue, voire Rose la poissonnière. Donc, logiquement, ce sujet est désormais présent de manière allusive ou vraiment traité par quelques chansons (“depuis 3 jours”, ”dans ta tête, tu fais encore la bande”). Il n’en reste pas moins relativement discret.
La bande devient un sujet : avant on se contentait de la chercher, maintenant “à DK on fait la vichersbende […]”
 
On la décrit dans les chansons :
- ”l’avant bande” : le matin avec les Kakestecks
- “tiens bon la bande” : dans la pagaille des rangs
- ”le fatigant”, le cazin qui veut y mettre de l’ordre
- ”le rigaudon final
- ”l’après bande” : de l’incompréhension de certaines femmes devant le bien-être de leurs hommes partis faire la fête !
S’il fait très très froid en Citadelle, ça donne “quand la pisse elle gèle
Au carnaval tout est permis… nous donne une idée de ce qu’un masque pourrait faire...
On peut dire que c’est un sujet vraiment nouveau du répertoire.
 
L’émulation est générale. Après le mouvement de réappropriation de la fin des années 70, jusqu’à la fin des années 90 (avec le temps fort du carnaval annulé de 1991 comme nouveau déclic), le nombre des petits groupes de musiciens et chanteurs n’a cessé d’augmenter, les créations de nouvelles chansons de même. Ce mouvement ne semble pas faiblir pour le moment, même si, en ce qui concerne les nouveaux morceaux, rien n’émerge vraiment. Les Prouts restent la référence principale.
 
En conclusion, on peut dire que vraisemblablement, le répertoire global du carnaval n’a jamais été aussi riche qu’aujourd’hui. Et ce, comme je viens de le dire, grâce aux nombreux paroliers, musiciens qui rivalisent d’inventivité, tout en restant dans une grande tradition qu’on qualifiera de dunkerquoise !
En ce qui concerne l’avenir de cette fête, les interrogations sont nombreuses. La municipalité vend le carnaval comme un des grands atouts de la ville, en mettant en avant la grande convivialité qui y règne (et qui est bien réelle d’ailleurs). Il en résulte un grand afflux de touristes qui viennent “consommer” la fête sans en rien connaitre. On note également que les nouveaux habitants de l’agglomération s’y intègrent facilement mais en ignorent généralement les fondamentaux, à savoir les chants, la “tournure d’esprit” et le parler dunkerquois (qui subsiste principalement à cette occasion ).
D’autre part, aucune contrainte n’est imposée aux commerçants, notamment les cafetiers, qui diffusent des musiques d’ambiance (non dunkerquoises) à des puissances sonores qu’aucun groupe musical ne saurait couvrir. Ceci nuit énormément à l’ambiance et au caractère de cette fête. Il ne faudrait pas, comme ça commence à se produire, que le carnaval à Dunkerque même, soit privé des Dunkerquois, qui se réfugient déjà dans les multiples bandes environnantes…
 
Roch Vandromme
Novembre 2023
 
 
dessin de René Cotinot, 1927 (extrait)


Pipres et piprelours, par Roch Vandromme

publié le 24/4/2015
mise à jour le 511/2025
 
 
Carte postale, dessin de Fernand Brasseur (1887-1965)

A Dunkerque, ville de Flandre française, si on entend le son du fifre, c’est presque exclusivement pendant la période du carnaval. Ces jours-là, pipres et piprelours sont de sortie.

Petit Historique

Avant de devenir un port de commerce à la fin du XIXe siècle, puis un port industriel, Dunkerque fut longtemps un grand port de pêche (au hareng, puis à la morue), et de par sa situation géographique, un port corsaire et une place forte militaire importante. Le carnaval a gardé la trace de ce passé. Il est d’essence maritime. Il s’agit de la bande des pêcheurs, « vischersbende » en flamand, qui n’était à l’origine que partie des anciennes mascarades, et qui en est devenue au XIXe siècle le tout, probablement parce que le plus caractéristique et le moins formel des groupes ou bandes. Et cette bande déambule, au moins depuis le XIXe siècle, au son du fifre et du tambour, formation instrumentale qui fut introduite, ici comme partout, par les mercenaires suisses.
Dès le XVIe siècle, du temps des Pays-Bas espagnols, il y a des fifres dans la région. L’achat d’un fifre dans la Châtellenie de Furnes en 1524, en est le plus ancien témoignage. Fifres et tambours accompagnaient probablement déjà les guildes militaires et les confréries. Sur un tableau de 1633 représentant la guilde Sainte Barbe (actuellement au Musée des Beaux-Arts), on voit un joueur de fifre accompagné de deux tambours. Cette présence du fifre militaire dans la ville fut encore renforcée dès le début de la période française (1662), par les cliques des nombreux régiments qui y séjournaient : régiments écossais, suisses, de la Fère, etc… , qui avaient des cliques de fifres et tambours. De même qu’ils participaient aux principaux offices religieux, les instrumentistes de ces formations devaient probablement participer aux fêtes locales (les processions et mascarades), leur présence n’excluant d’ailleurs pas d’autres musiciens.

Déjà, du temps des Pays-Bas espagnols, fifres et tambours avaient gagné la sphère de la musique populaire ; le jour de la kermesse, à la Saint Jean, avait lieu une procession réunissant les corps de métiers, les confréries, les couvents, le clergé et les autorités de la ville. Cette procession s’agrémenta dès le XVIe siècle d’éléments plus spectaculaires tels les danseurs d’épée (dès 1519), puis le géant de la ville, et enfin des chars avec danseurs et musiciens. Nous avons trace à Bollezeele, non loin de Dunkerque, de fifres et tambours accompagnant les danseurs d’épée (1662-1663). Plus tard, vers 1750, dans une gravure descriptive de la procession de la Saint Jean, nous voyons un fifre (ou une flûte ?) et deux tambours, devant les confréries Sainte Barbe et Saint Michel. Peut-être d’ailleurs étaient ils plus nombreux que ce qui nous est montré. Le géant de la ville, le Reuze, (géant en flamand), ferme la procession. C’est un géant d’osier et de carton peint, comme on en trouve dans tout le Nord-Pas-de-Calais et en Belgique, héritage de la période espagnole. Celui de Dunkerque est l’un des plus anciens et des plus connus. […]
 
La suite : mise à jour en novembre 2025 :



Les photos : 
 




les fifres dans la bande des pêcheurs

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Texte publié dans les Actes du colloque Pifres, pifraires, Fifres et sonneurs de fifre qui s'est tenu à Cordes (Tarn) en décembre 2013.



édité par l'association CORDAE/ La Talvera

Sommaire :

Claude Ribouillault : L'univers des tambours & fifres. Histoires, géographie, substituts & confusions
Daniel Loddo : Pifres e pifraires dans l'Albigeois et les régions limitrophes
Claudie Achard : Hautbois, fifres et Poulain à Pézenas du XVIIe au XXIe siècle
Wim Bosmans : Fifre et tambour en Flandre
Adrien Laduron : L'origine du répertoire pour tambours et fifres en Entre-Sambre-et-Meuse
Pierre-Jean Vandersmissen : Les marches folkloriques de l'Entre-Sambre-et-Meuse
Roch Vandromme : Pipres et piprelours
Xavier Vidal : Fifres & tambours pour les fêtes de la Pentecôte à Moissac
Jean-Michel Veillon : Fifre et flûte en Bretagne : origines et évolution
Alain Charrié :  Le renouveau du fifre en Bas-Languedoc
Guido Raschieri et Hario Meandri : Fifres et tambours du Carnaval historique de la ville d'Ivres
Christian Vieussens : Fifres et ripataoulères de Gascogne, histoire(s) d'un réveil
Thierry Cornillon : L'itinéraire d'apprentissage d'un fifre de Vésubie
Carlos Valverde : Le pifano brésilien
Daniel Loddo : Pifre, pifre o pifano, un curieux va et vient musical entre l'Occitanie et le Brésil
Guilhem Boucher : Le mot pifre : un abîme de tubes & et de souffles
Thilo Hirsch :  "Colin tan plon". Les fifres et tambours de la Grande écurie et des Gardes Suisses à la cour de France, et leur traces dans le carnaval de Bâle
Pierre Laurence : Joueurs de fifre en Bas-Languedoc : implantation géographique et contextes de pratique instrumentale





mardi 14 octobre 2025

Une cloche du carillon de Dunkerque du XIXe siècle

 Elle a survécu au bombardements de 1940/45, et aussi à la fonte, comme ses sœurs qui ont certainement disparu pour fabriquer les cloches du carillon actuel
 
Elle porte plusieurs mentions :
- la signature du fondeur : ALJ VAN AERSCHODT SVCCESOR AL VAN GHEYN 1852
- au bas est gravé : La ville de Dunkerque à Paul Cappelle petit-fils d'Adolphe PIETERS, carillonneur de Dunkerque 5 Nov 1950
Elle est dans les collections du musée des Beaux-Arts de Dunkerque, ancienne cote n°473
Elle donne un LA
dimensions : hauteur 235 mm, diamètre 190 mm

photo Patrick Delaval

Elle a donc été fondue par André Louis Jean VAN AERSCHODT (1814-1888) fondeur de cloches à Louvain, successeur de son grand-père André Louis VAN DEN GHEYN (1727-1790)
 
Tous  les carillonneurs dunkerquois l'ont fait sonner. Le premier est Théophille MANOTTE, jusqu'en 1860, puis François Adolphe Bernard PIÉTERS (1832-1901) et ensuite son fils Adolphe Michel Édouard (1872-1932).
Paul CAPPELLE (1879-1952) est un écrivain, journaliste au Nord Maritime.
 
 *****
photos Patrick Delaval
 
Le musée conserve cette seconde cloche, plus ancienne. Elle est datée de 1637 et provient de l'ancien hôpital Saint-Julien. Elle a été classée Monument Historique le 7 octobre 1935
Avec cette inscription : AMOR VYNCIT OMNYA
Elle donne un SOL
dimensions : hauteur 230 mm, diamètre 220 mm



lundi 6 octobre 2025

Le carillon de la ville de Bailleul

Par Ignace de Coussemaker, historien
extrait des Annales du Comité flamand de France 1883



On y détaille les travaux faits au carillon en 1716, sous la surveillance du Magistrat de Bailleul, dirigé par Pierre Henri de Coussemaker. Tous les membres du conseil sont mentionnés, avec leur biographie. Mais comme souvent, on oublie de parler du carillonneur. Dont on ignore les noms pour le XVIIIe et le début du XIXe siècle, à moins que quelqu'un les connaisse. Pour ma part et pour la fin du XIXe, je ne peux citer qu'un seul nom et encore c'est un hasard qu'il soit parvenu jusqu'à nous. En mai 1891, le chansonnier Alexandre Desrousseaux vient à Bailleul pour faire une excursion, le poète lillois était arrivé près de l'Hôtel de Ville, quelques instants avant que sonnassent au beffroi onze heures du matin. Or, le carillon, au lieu de jouer le refrain ordinaire, fit entendre tout à coup la célèbre Canchon Dormoire. C'était là une délicate attention du carillonneur, M. Freson, qui avait appris l'arrivée à Bailleul de l'auteur de la berceuse si populaire du Petit Quinquin. Desrousseaux, les yeux humides de larmes, s'arrêta et, la tête découverte, resta immobile jusqu'à la fin de ce concert improvisé en son honneur. Puis voulant prouver le plaisir que lui causait cette surprise il fit mander le carillonneur, lui serra affectueusement les mains et, prenant congé de lui, il ajouta : Je reviendrai un mardi-gras voir Bailleul en liesse, saluer son antique beffroi et les cloches de son carillon de 1742*, si aimable pour moi en 1891… Desrousseaux ne put réaliser sa promesse, car quelques mois plus tard, il ressentait les premières atteintes du mal qui devait l'emporter. Paul Van Houcke, témoin de la scène, in le Grand Écho du Nord du 24 février 1897.

Henri Freson n'est pas mentionné comme carillonneur dans l'état civil, son métier officiel est horloger, il devait probablement être aussi chargé de l'entretien de l'horloge du beffroi et de son carillon. Issu d'une vieille famille bailleuloise, il est né en 1838, il meurt en 1900.

le beffroi et son carillon

* Dans Mœurs populaires de la Flandre Française (1889), A. Desrousseaux est plus précis. Il reprend la source d'Ignace de Coussemaker : Les cloches du carillon, fondues en 1717 par Antoine BERNARD de Neufchateau (Vosges) fonctionnèrent pour la première fois, à l'entière satisfaction du Magistrat et des bourgeois, le 7 mars 1718. […] Cet instrument comprend 31 cloches, dont 23 portent des inscriptions diverses, ainsi que les armes de la ville. […]
Le carillon de Bailleul joue mécaniquement : 
- A l'heure, l'air de la Valse du havre (n°1500 de la Clé du Caveau) que Scribe a rendu célèbre […] composé par un certain Despinois.
 

- A la demi-heure, ce carillon joue un petit air dont on ne connaît pas l'auteur et qui ne date pas de plus d'une vingtaine d'années. On en trouve la notation, ainsi que l'air précédent, dans la brochure de M. Ig. de Coussemaker. Un carillonneur, rétribué par la ville, se fait entendre le mardi, jour de marché, de onze heures et demie à midi, ainsi qu'à toutes les cérémonies et fêtes locales et publiques.



dimanche 28 septembre 2025

Pierre Lobert, premier pirate radio… du Nord

mise en ligne le 30/6/2017
mise à jour le 6/3/2023 : ajout d'un lien vers Phonobase
mise à jour le 28/9/2025 : ajout du minutage de l'émission + quelques photos et informations complémentaires


magasin Radio-Nord, rue Neuve devenue rue du Président Wilson
collection personnelle


En 1933, Pierre Lobert (1906-2002), radio électricien installé rue Neuve à Dunkerque, utilisait les interruptions d'antenne de Radio PTT Nord, entre 11h et midi, pour diffuser des disques. Cela a duré deux ans, avant que les PTT viennent interrompre la diffusion.

les baraquements sur la place du Palais de Justice, CP-photo Joseph Top
collection personnelle

Après la guerre, son magasin provisoire est installé place du Palais de Justice, dans la "cité commerciale". Mais c'est à Malo, place Delta, dans son appartement aménagé en studio (pour corriger l’acoustique des tentures noires avaient été mises en place par les pompes funèbres) que se fait le premier enregistrement du carnaval dunkerquois, d'après le témoignage de Jean Wispelaere qui y a participé (article VdN 2/3/1996). Il fait graver les disques 78 tours bien connus des collectionneurs, et des carnavaleux. Il est joué par l'orchestre dirigé par Alex GROUX (1903-1957), arrangement d'Albert Cousu, soliste Albert Truquet (1925-1983).


deux versions des enregistrements du Carnaval
à gauche celle de 1946
collection personnelle

à écouter sur Phono base ICI


réédité en 45 tours quelques années plus tard
le fichier mp3 ICI
collection personnelle


Vous retrouverez toutes ces infos, et d'autres dans l'émission d'Antoine Quaghebeur, diffusée sur Radio Uylenspiegel le 27 juin et disponible ICI

Sommaire de l'entretien avec Pierre Lobert
 

01'31 - Dès 1930, à la demande de René Louis Peulvey (1888-1976), industriel dunkerquois nommé directeur général, Pierre Lobert devient le délégué régional de Radio Luxembourg créée deux ans plus tôt. Il diffuse des émissions en direct, via une ligne téléphonique, depuis un café de la place Jean Bart. A partir de 1949, les émissions sont enregistrées sur disques 78 tours au cinéma le Palais Jean Bart, place de la République.
 

 
08'17 - 1948, les premiers essais de réception de la télévision à Dunkerque, sur un téléviseur construit par P. Lobert, avec l'aide du directeur des Chantiers de France et les pompiers de la ville pour installer un pylône en face de la salle des pompiers.
 
14'29 - 1949, le discours par le maire de Bergues, Henri Billiart, pour la remise de la croix de guerre à la ville.
 
27'00 - 1948 discussion avec le général Gilson à propos de l'avenir de la télévision en France.

32'04 - vers 1930 une radio-pirate dunkerquoise, 1ère saisie d'une radio pirate.
 
33'09 - juillet 1954, reportage sur le lancement du pétrolier Porthos, interview de M. Lefol, directeur des Chantiers de France. On peut entendre un extrait du pas redoublé Salut aux A.C.F., composé par René Cordier.
 
source : revue Entre Nous 1959


43'29 - 1950, des airs du carillon de Dunkerque, enregistrés à Calais, joués par le carillonneur de Calais Marcel Rouillard (?), diffusés depuis le beffroi de Dunkerque, pour les fêtes du tricentenaire de la naissance de Jean Bart

46'00 - Adalbert Carrière (1921-2012), carillonneur de Bergues et Dunkerque, joue sur le carillon de Dunkerque, la Cantate à Jean Bart +  le bruit en direct dans la cabine en 1992 enregistré par Antoine.
 
48'37 - 1946, premier enregistrement du carnaval dunkerquois (voir plus haut), le disque s'est vendu même au Canada.

54'37 - les meetings de Paul Raynaud, député de Dunkerque, et les perturbateurs communistes.
 
58'06 - les résultats du tour de France affichés et diffusés sur la place Jean Bart sur la façade de l'Impeccable.

mercredi 24 septembre 2025

La maison de danse à Fives

2008

  


Christophe Declercq†, l'un des violoneux de Mabidon, au cours d'une tournée en Hongrie, y avait entendu parler des "maisons de danse", lieux de pratique de musiques et danses traditionnelles hongroises. A l'initiative de Mabidon démarrait sur cette idée, fin 1978, la première Maison de danse à la maison de quartier de Fives. Le matin, ateliers instruments et danses ; l'après midi, bal avec les musiciens présents. Pas de formateurs attitrés, pas de programmation de groupe, le principe étant le libre échange et la libre participation. […]

la suite dans l'article

Trad Magazine n°120, juilet/août 2008

"Deux jeunes musiciens rendent hommage à une belle aventure qui a fait danser le Nord dans les années 1980"

Aurélien Tanghe : guitare
Gabriel Lenoir : violon
 
01- En attendant le printemps (O. Marichez) / Papier veiné (C. Declerck) / La petite histoire du side-car de Thomas O'Malley (A. Duchêne) - scottisches
02 - La bêcheuse (F. Dubarre) - valse
03 - Neige (M. Debrock) - bourrée 3tps
04 - Klauwaerts (J.-J. Révillion) / La maison de danse (J.-J. Révillion) - polkas
05 - Rue du val fleuri (Pierre Sacépé) - mazurka
06 - Poule ou coq (C. Declercq) / Berry Tour (M. Lebreton) - Bourées 2tps
07 - Histoire de… (Didier Delehedde) / Carbure bémol (J. Leininger) - scotisches
08 - Valse du rubis (G. Lenoir) - valse
09 - RN 59 (F. Dubarre) - mazurka
10 - La bourrée du conscrit (J.-J. Révillion) - bourrée 3tps
11 - Adieu les gens (C. Declercq) / Valse à Sylvie (P. Goetgeluck) - valses
12 - L'apprenti (J. Biget) - scottisch
13 - Fishing in the rain (K. Delavier) / Heure d'été (C. Declerck) / Trip to Armbouts (E. Dantin) - jigs
14 - Chrysalide (A. Tanghe) - scottisch-valse
15 - Au pays des monts (D. Demarck) - ballade

enregistré en 2007 à Mons en Barœul par Mike Varlet
édité par Dominique Bommel

Télécharger ICI avec le livret
 




Charles Delabre, compositeur (1870-1938)

mise à jour du 24/09/2025 ajout de la photo de la salle des fêtes et des infos sur éditeur A. L. Piot
mise à jour du 12/03/2023 ajout d'un lien vers concert BULCO
mise à jour du 24/02/2023 ajout d'une vidéo Vaines pensées
mise à jour du 06/07/2018 ajout d'une vidéo de Nadia Bendjaballah
mise à jour du 08/05/2018 ajout d'une vidéo de Youkali
mise à jour du 21/01/2017 ajout de la conférence/concert




Charles Delabre, vers 1925
collection personnelle


Charles Désiré Delabre, né à La Madeleine le 25 juillet 1870, est issu d'une famille d'artistes. Ses grands parents paternels, Hyacinthe Delabre et Annette Joséphine Bénard, sont comédiens dans des troupes de provinces puis à Paris, notamment au théâtre du Châtelet puis au théâtre de l'Ambigu. Son grand oncle, Henri Bénard (1810-1879), professeur d'ensemble au Conservatoire de Lille, est le chef d'orchestre du Grand Théâtre de Lille et chef de la musique des pompiers de la ville. Son père César Hyacinthe, né à Toulon, est d'abord comédien quand il s'installe à Lille vers 1866, il devient chef de  la musique du bataillon des canonniers sédentaires de Lille. C'est auprès de son père que Charles reçoit ses premières leçons de musique et d'harmonie.
Parallèlement à ses études musicales au Conservatoire de Lille, il débute comme chef d’orchestre dans les brasseries lilloises pour lesquelles il compose de nombreuses musiques de danses. En 1899, à Dunkerque, il épouse Hortense fille de l’entrepreneur maritime Victor LANGEVIN. Il termine ses études musicale au Conservatoire de Lille par un premier prix de piano en 1901 puis il s’installe définitivement à Malo les Bains au 10 de la rue de Bapaume.
 
Il participe à la vie musicale dunkerquoise et surtout malouine en organisant des concerts et en dirigeant pendant près de dix ans l’Association Symphonique et Orphéonique de Malo avant 1914. Mais il démissionne de son poste suite à des querelles au sein de la société. Il se consacre alors exclusivement à la composition et participe à de nombreux concours à Paris, Nantes (1904), Lille (1909), Nice (1923) et Bruxelles (1909) où il remporte des médailles d’argent ou de vermeil.

Il laisse une œuvre considérable d'environ 90 compositions, des mélodies charmantes, des chœurs avec accompagnement d’orchestre et des pages musicales de circonstance : Cantate à Jean-Baptiste Trystram, La Cantate à la ville de Malo-les-Bains (1911), Ascendam Superius, marche malouine (1926), Casino polka (1900), Malo plage, mazurka (1900), Le Vivat de la Jeune France, pour ne citer que celles en relation avec sa ville adoptive.
Il n'est pas musicien de profession. Pendant 38 ans, il est chef de service chez Jokelson où il dirige les grues flottantes. Il a eu deux enfants, Raymond, né en 1900, ingénieur naval aux Chantiers de France et Louise, née en 1901.
Il décède le 28 juillet 1938 dans sa maison de la rue de Bapaume, il venait de fêter ses 68 ans.
Tous ses manuscrits, plus de 400 documents qui ont miraculeusement échappés aux bombardements, sont conservés dans une collection privée.


Christian Declerck



collection personnelle



collection personnelle




Casino polka,  interprétée par Emmanuelle Maggesi
le 21 juin 2015, à la Bibliothèque de l'Université de la Côte d'Opale
BULCO, à Dunkerque

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Conférence/concert Compositeurs et artistes dunkerquois au XIXe siècle
à l'auditorium Bizet, Dunkerque-Petite Synthe le 24 novembre 2016



y sont interprétées les œuvres de Charles Delabre :

- Romance pour cor en fa et piano, par Eric Lorillard et Alice Nenert
- Ascendam superius, par Alice Nenert
- Casino polka, par Thomas Malet
- Douce chanson, mélodie, par Alice Nenert
- Sancta Cæcilia, par Frédéric Daudin-Clavaud et Alice Nenert
- Mères, ne pleurez plus, élégie, par Emmanuelle Piot, Alice Nenert, Véronique Rousselle et Frédéric Daudin-Clavaud
 
 - Attente, de Paul Max et Charles Delabre, par Pascale Meesemaecker et Thomas Malet

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- Vaines pensées ©, mélodie de Charles Delabre, par Emmanuelle Piot, soprano et Thomas Malet, piano
en 2015 à la BULCO de Dunkerque, au cours d'un concert de la Fête de la Musique

Programme :
- Sancta Cæcilia, méditation, de Charles Delabre, par Emmanuelle Maggesi (piano) et Frédéric Daudin-Clavaud (violon)
- Ave Maria, de Charles Delabre, par Pascale Meesemaecker (chant), Thomas Malet (piano) Frédéric Daudin-Clavaud
- La jeune malade, de Louis Manotte, par Pascale Meesemaecker et Thomas Malet
- Attente, de Paul Max et Charles Delabre, par Pascale Meesemaecker et Thomas Malet
- Offrande, de Paul Verlaine et Charles Delabre, par Pascale Meesemaecker et Thomas Malet
- Perseveranza, de Théophile Manotte, par Maëlan Tomasek (piano)
- Ascendam Superius, de Charles Delabre, par Emmanuelle Maggesi
- Casino Polka, de Charles Delabre, par Emmanuelle Maggesi
- Douce Chanson, de Charles Delabre, par Emmanuelle Maggesi
- Méditation extraite de la Légende de Saint Ulphe, de Jules Collery, par Emmanuelle Maggesi et Frédéric Daudin-Clavaud
- Romance pour cor en la, de Charle Delabre, par Eric Lorillard
- Le Carillon de Dunkerque, paroles de Jean Marie Albert Pérot, musique de Louis Manotte, par Emmanuelle Piot et Thomas Malet
- Romance, de Victor Dourlen, par Emmanuelle Piot et Thomas Malet
- Vaines pensées, de Charles Delabre, par Emmanuelle Piot et Thomas Malet
- Mères ne pleurez plus, de Charles Delabre, par Emmanuelle Piot, Véronique Rousselle (violoncelle), Emmanuelle Maggesi et Frédéric Daudin-Clavaud

le concert entier ICI


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En résidence-mission "musique" dans le cadre du Contrat Local d'Education Artistique mis en place par la CUD, Nadia Bendjabellah a souhaité travailler sur les musiques de compositeurs locaux. Elle a notamment sélectionné plusieurs compositions de Charles Delabre.



Foot Balle ©, polka-valse composée en 1901 à Lille
Extrait du concert donné par le quintette Youkali au Jazz-Club de Dunkerque le 20 avril 2018.

Youkali :

Adrien Alix, contrebasse
Nadia Bendjaballah, vibraphone
Alice Fagard, voix (qui n'intervient pas dans cet extrait)
X, violon alto
Sven Riondet, accordéon

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Jeunesse ©, valse lente op. 57 
Extrait de la sieste musicale donnée à la Médiathèque de Grande Synthe le 21 avril 2018

Nadia Bendjaballah, vibraphone
Adrien Alix, arrangement





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Inventaire des œuvres :
 À demain, op. 4, retraite pour Café et Théâtre Concert, manuscrit.
À la frontière, chant patriotique, à monsieur Paul Krüger, président de la république Transvaalienne, op. 27, manuscrit, (1900).
À Mourmelon, marche militaire pour orchestre op. 8, à leurs Majestés Impériales le Tzar et la Tzarine de Russie, Paris A. L. Piot, idem manuscrit.
Amours d'automne, romance pour violoncelle, manuscrit.
Les arrivistes, chanson, paroles de Jean Croisette, manuscrit, (1903). 
Ascendam Superius, marche malouine op. 67, (1926).
Attente !..., poésie de Paul Max, manuscrit. 
Avant l’exil, mélodie, Paris A. L. Piot* (1900). 
Ave Maria, avec accompagnement de violon - piano ou orgue, manuscrit. 
Ballet égyptien, suite d'orchestre, manuscrit (1910). interprétation par Nadia Bandjaballah
Cantate à Jean Baptiste Trystram, chœur à deux voix d'hommes, manuscrit (1910). 
Cantate à la ville de Malo les Bains, composée en l’honneur de son 20e anniversaire, juin 1911 pour 1 ou 2 voix, Dunkerque M. Bar, op. 48, (1911), idem manuscrit.
Casino polka pour piano, op.19, Paris, Vve A. L. Piot* (1900).
Chanson, op. 63. Chanson, op. 64. 
Chanson, op. 65, manuscrit, (1924). 
Chanson du bicycle, op. 74, manuscrit (1933). 
Chanson de la nuit, chœur, par A. Coulon, manuscrit. 
Clotaire, pour chœur et orchestre, manuscrit.
Constellation, valse op. 33, manuscrit (1901). 
Cortège des brahmanes, pour longues trompettes en ut, manuscrit (1911). 
Danse égyptienne pour piano, op. 26, dédiée à monsieur le docteur GEERAERT maire de Malo les Bains, Paris, A. L. Piot (1900). 
Déception, le Kaiser à son chancelier durant l’occupation allemande, satyre, op. 56, manuscrit (1915/1919). 
Désillusion, romance op. 37, manuscrit (1901). 
Douce chanson, mélodie pour piano, œuvre primée au concours des Rosati de Flandre en 1923, publié dans la Gazette Musicale de France de mai 1925, op. 12, + manuscrit. 
En avant !!!, marche militaire pour harmonie op. 44, manuscrit, (1903). 
En Bohème, fantaisie pour orchestre op. 6, manuscrit. 
Enigme !, romance, manuscrit.  
Exil de Manon, chanson op. 66, manuscrit. 
Fleur de mai, rêverie pour violon op. 11, à monsieur Alfred DUMONT, maire de Dunkerque, Paris, A. L. Piot (ca 1901). 
Foot balle, scène comique op. 36, répertoire de M. RAMAY, manuscrit (1901). 
Fragment d'airs dunkerquois, manuscrit. 
Il suffit d'être femme, chanson, op. 43, manuscrit. 
L'incomparable, polka pour trombone op. 32, musique de DELCOURT, arrgt. Ch. Delabre, manuscrit (1901). 
Invocation, pour piano ou orgue et violon, manuscrit. 
J'ai gagné le gros lot, chanson comique op. 2, manuscrit..
Jeunesse, valse lente op. 57. 
Lâcheté !…, chanson op. 31, paroles de Albert PENTEL, créé par Mlle GERY à l’Olympia, manuscrit (1901). 
La maîtresse, chanson op. 34, paroles de Jean CROISETTE, manuscrit (1901). 
Malo plage, mazurka op. 28, Lille, l’auteur + manuscrit (1900). 
Ma mie, mélodie, op. 23, à mon frère Jules DELABRE, professeur de musique, Paris, A. L. Piot (1900) + manuscrit (1899). 
Manger, boire et danser, charleston op. 70, manuscrit (1927).
Manon Lescaut de l’abbé Prévost, suite de mélodies, op. 21, Paris, A. L. Piot + manuscrit (1899). 
Marche guerrière, pour orchestre, manuscrit (1904). 
Marche des mutualistes, manuscrit (1904). 
Marche joyeuse des Flandres, op. 75, manuscrit (1933). 
Marche scandinave pour piano, à sa Majesté Royale Oscar II roi de Suède et de Norvège op. 25, Paris Vve A. L. Piot (1900) + manuscrit (1899). 
Marche solennelle pour piano, à son Excellence Monseigneur Guy de Lusignan prince de Chypre, de Jérusalem et d’Arménie op. 1, Paris A. L. Piot + manuscrit (1900). 
Mères !… ne pleurez plus, élégie, créée aux armées par M. ACCOLLET, op. 55, manuscrit (1918). 
Musical review, ouverture pour orchestre, manuscrit (1903). 
Nice joyeuse !…, chanson carnavalesque, manuscrit (1923). 
Offrande, op. 59, poésie de Paul Verlaine, manuscrit. 
Olympia marche, à M. et Mme Charles ERNST, directeur de l’Olympia de Lille, op. 29, manuscrit (1900). 
Pité pour l'infortune, chanson, parole de Jean Croisette, manuscrit (1903). 
Première étape, pas redoublé, op. 9. 
Prière d'enfant, mélodie pour violon et piano, op. 24, Paris, A. L. Piot* (1899) + manuscrit. 
La progéniture, chanson, manuscrit, (1903). Ré-fa-la, polka pour orchestre, manuscrit.
Romance sans paroles, pour cor en fa, à monsieur E. Léonard, 1er prix du conservatoire de Bruxelles, op. 2, manuscrit, (1903). 
Romance sans paroles, pour violon et piano. 
La route à suivre, op. 72, paroles de Ed. MARTIN, manuscrit, (1929). 
Sancta Cæcilia, méditation pour violon et piano, à Monsieur Lucien DEBAECKER, op. 3, Paris Vve A. L. Piot (1900). 
La santé, chanson, manuscrit (1903). 
Scènes égyptiennes, pour harmonies, op. 47. 
Sensitives, duo pour violon et violoncelle, à monsieur Charles ERNST, directeur de l’Olympia de Lille, manuscrit. 
Simple aveu, madrigal, op. 7, à monsieur Victor LANGEVIN, Paris, A. L. Piot* (1900). 
Soir d'été, bleuette pour piano, manuscrit. 
Souvenir d'Alsace, élégie pour ténor ou soprano, à monsieur BERTRAND officier de la Légion d’Honneur, directeur de l’Académie Nationale de Musique op. 22, Paris A. L. Piot (1900) + manuscrit. 
Souvenir de Bohème, pour orchestre symphonique, manuscrit. 
Sur le lac, rêverie pour piano, manuscrit. 
Vaines pensées, mélodie pour soprano, manuscrit. 
Vers l’Est, ébauche manuscrite 
Vers l'exil, romance, extrait de Manon Lescaut, manuscrit, (1902). 
La vie de famille, chanson, op. 41, manuscrit (1903). 
Violetta, valse lente, dédiée à Mlle Yvonne BUTAYE, édit. Association des Compositeurs du Nord et du Pas de Calais, 20 rue du Chaufour, Lille + manuscrit (1909).
Le vivat de la Jeune France, dédié à monsieur Ernest MARQUIS, président de l’association Chorale La Jeune France, op. 73, manuscrit (ca 1930). 
Vive la paix, chansonnette op. 68, manuscrit, (1926).
Vive le bon roi carnaval, chanson carnavalesque, manuscrit (1923). 
 
* A.-L. Piot : Louis François Aimé, artiste dramatique (1879), puis agent lyrique (1896) et éditeur de musique, est né à Graville l'Heure (76) le 2 avril 1851, † Paris 7e le 7 mars 1900, époux de Anne Joséphine Louise Leroux (1850-1918), il était domicilié 13 faubourg Saint Denis.