mise à jour : 18/2/2023, ajout d'une photo de 1958
Mes remerciement à Annick Lefebvre-Vanwaelfelghem, fille de Maurice, qui m'a permis de reproduire ces documents familiaux et de les diffuser.
Maurice Vanwaelfelghem fils 1920-1986 photo : Desreumaux, Malo-les-Bains |
Je suis né à Dunkerque le 21 décembre 1920. Mon père [Maurice également, alias Scarly] jouant du piano dans les bals régionaux et chantant dans les concerts, ce qui se faisait beaucoup à l’époque (il était comique-troupier), je fus amené très vite à étudier la musique (saxo et piano) et, dès l’âge de 13 ans, je l’accompagnais au piano dans son répertoire ainsi que ses copains chanteurs eux aussi. J’appris très jeune l’accompagnement ce qui n’est pas toujours drôle, c’est à cause de cela que j’ai en tête pas mal de chansons et musique. En 1939, ayant appris qu’une musique militaire se formait au 8e génie de Versailles, je m’engageai pour 3 ans comme saxophoniste dans l’intention de me rapprocher de Paris et de préparer le concours de sous-chef de musique. Nous étions en juillet 1939 et en fait de musique je me suis bien vite retrouvé dans une compagnie devant assister aux cours de Radio et chauffeur poids lourds. Nous fûmes ensuite affectés dans une Compagnie de Transmission Divisionnaire et nous partîmes vers l’Est. Le 10 mai 1940 nous étions près de Rethel dans les Ardennes. Je fus fait prisonnier près de Saulieu et par petites étapes (à pieds) je me retrouvai à La Fère dans l’Aisne. Là ayant appris que les Allemands cherchaient 10 boulangers pour mettre en marche l’intendance de La Fère, je me présentai bien que ne connaissant rien du métier de boulanger. Je me disais que sur les dix prisonniers recrutés il y en aurait bien quelques uns qui connaîtraient le métier et cela marcha. Il faut dire que les gars de mon âge, c’est à dire nés en décembre 1920, n’ont pas été mobilisé. J’étais donc dans le pétrin, c’est le cas de le dire, à cause de la musique qui m’avait fait prendre un engagement de trois ans. Deux mois avant la déclaration de guerre. Mais encore une fois la musique me tira d’affaires car l’intendance était en dehors de la ville et les prisonniers, pour qui nous faisions le pain, étaient dans la caserne de La Fère, en ville. Ces prisonniers ayant monté, pour la fin de l’année 1940, un spectacle il leur fallait un pianiste. Aussitôt je fis mes offres de service, ce qui me permit d’obtenir des Allemands un laissez-passer permanent afin d’assister aux répétitions. C’est d’ailleurs ce même laissez-passer qui, en janvier 1941, me servit pour m’évader. Je rejoignais Dunkerque le plus vite possible, et, après deux semaines de planque, je rentrai chez moi. Je repris la vie normale de l’époque avec ce qu’elle comportait c’est à dire : bombardements anglais et restrictions. La semaine je conduisais (je n’étais donc pas déclaré puisque prisonnier évadé) et le dimanche c’était le café-concert pour Français et Allemands, les dancings étant interdits par les occupants. J’accompagnai une jeune chanteuse dunkerquoise qui avait à son répertoire Le Rêve passe, repris en chœur par tous les Français présents, de quoi se retrouver en prison. La direction faisait venir, les dimanches et jours de fête 2 ou 3 artistes professionnels, qu’elle choisissait parmi ceux proposés par l’agence de spectacles BERTAL de Lille. Pendant trois ans j’ai donc accompagné pas mal d’artistes, dont une certaine Jacqueline RAY [Jacqueline ENTE, qui deviendra Line RENAUD], toute jeune et bien mignonne mais très bien gardée par sa Tata qui ne la quittait pas d’une semelle. Je crois avoir aussi accompagné SIM qui devait débuter à l’époque. En septembre 1944 deuxième évacuation de la poche de Dunkerque tenue par les Allemands. Je me rendis à Lille pour essayer de trouver du travail dans la musique et tout naturellement je m’adressai à l’agence BERTAL qui maintenant me connaissait bien surtout comme pianiste accompagnateur. Une chance, 2 jours plus tard j’étais convoqué à l’Agence. Une troupe de Paris cherchait un pianiste le sien venant d’être victime d’une appendicite. Je partis donc avec cette Troupe pour finir la tournée et revins avec elle à Paris. Je trouvais à me loger Passage de l’Industrie, pas pour longtemps car au café Batifol où je me rendais régulièrement, je fus bien vite engagé pour une autre Revue mais là c’était pour le midi de la France [sur son agenda de 1947 on retrouve les dates et lieux, en tout plus de 70 prestations du 10 janvier au 8 avril]. J’étais seul comme pianiste et à chaque représentation des musiciens locaux m’attendaient ce qui m’obligeait à des répétitions presque quotidiennes. Puis ce fut le départ pour une troisième revue mais là dans le Nord, toujours comme pianiste [une trentaine de dates du 3 mai au 7 juin]. Le Directeur ayant appris, je ne sais comment, que j’étais aussi chauffeur, il me demanda de conduire le camion car toutes ces tournées se faisaient en camion avec les bagages dans le fond, les artistes s’installant tant bien que mal car, à cette époque, il n’était pas question de cars. Et ainsi, chauffeur le jour, pianiste le soir, j’achevai cette tournée à Lille presque le jour de l’Armistice. Comme il n’était pas question de rentrer à Dunkerque tout de suite, je travaillais à Lille dans différents dancings et music-halls
et je devenais l’accompagnateur de BERTAL qui était un chanteur très populaire dans la région du Nord. Fin juin 1945, retour à Dunkerque. J’obtins une place de chauffeur aux Ponts et Chaussées – Service Maritime (Parc Autos), place que j’ai gardée pendant 35 ans. Naturellement il n’était pas question, pour moi, d’abandonner la musique, bien au contraire. Les Allemands étaient partis, la danse reprenait ses droits. Un jour la musique me fit rencontrer celle qui devait devenir ma compagne des bons et mauvais jours. Cela se passait dans un crochet radiophonique, très en vogue à l’époque. Une jeune fille, dont les parents étaient de passage à Dunkerque avec leur péniche, se présenta et je l’accompagnai, elle avait d’ailleurs une très jolie voix. Évidemment elle ne fut pas crochetée mais le pianiste lui le fut et voilà 39 ans que cela dure. De notre union naquit d’ailleurs trois enfants, aujourd’hui mariés et qui nous ont donné des petits enfants. Pendant toutes ces années, je fus très content de faire de la musique, samedis et dimanches, soit dans les bals, les kermesses, les banquets, etc. Elle contribua à élever nos trois enfants. J’ai donc arrêté la musique à la venue du Rock, dans les années 1960. Maintenant à la retraite, j’assiste mes petits enfants qui tous font des études musicales. C’est là l’histoire toute simple de ma vie dans laquelle, vous avez pu le constater, la musique a joué un très grand rôle. Elle m’a souvent permis de me tirer d’embarras.
Maurice VANWAELFELGHEM
St Pol sur Mer, le 12 novembre 1984
Quelques orchestres dunkerquois auxquels ont participé Maurice père et fils
Maurice père et son frère Paul à Saint Pol sur Mer, en 1926 |
avril 1957, sortie du disque En direct du carnaval de Dunkerque |
orchestre "Jazz" vers 1950/60 avec Albert Bertein, André Ranson et Roger Naert |
Mes remerciement à Annick Lefebvre-Vanwaelfelghem, fille de Maurice, qui m'a permis de reproduire ces documents familiaux et de les diffuser.
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