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Raccourcis

lundi 20 octobre 2025

Maurice Cornette, souvenirs d'un musicien

 

En 1983, l'association Het Reuzekoor publie dans sa revue Plach'iou, un entretien avec Maurice Cornette, musicien coudekerquois né en 1895. Il a connu le Dunkerque d'avant les deux guerres, pratiqué toutes les musiques : harmonies, accompagnement de films muets, concerts dans les cafés du centre ville et de la plage, bals dans les même lieux et après les bandes de carnaval. Dans le même temps, il était professeur à l'école de musique de Coudekerque-Branche. Il nous livre un témoignage unique et très détaillé sur sa pratique, ses rencontres, et l'ambiance de cette "belle" époque.
 
L'article est intéressant, mais le plus intéressant c'est son entretien, enregistré sur cassette par Maryse Collache qui a été conservé par l'association. Ce qui permet de compléter le texte. On a en prime les interventions de sa fille Odette et de son beau-fils, Roger Deblock, qui complètent sa mémoire parfois défaillante.
Maurice nous parle de son apprentissage du solfège en 1906, avec un voisin, Lucien Dimanche (1880-1955), petit neveu de Stéphanie Dimanche, plus connue sous son surnom de Manootje. Il intègre rapidement la société des Amis Réunis de Coudekerque-Branche, concurrente de l'harmonie catholique (surnommée les Blincke Piche).
Puis ses qualités de bon musicien le font embaucher dans les cirques qui s'installent pour un mois chaque année en janvier sur la place Jean-Bart : Le cirque Palisse, le cirque Pourtier et le cirque De Jonghe. Il se fait donc remplacer chaque année de son emploi de trombone solo à l'orchestre du théâtre de Dunkerque pour jouer dans l'orchestre du cirque. Il est musicien au théâtre d'octobre à mars, sauf en janvier, ce qui lui fait un second emploi que lui reproche son chef de service (il est employé de la société du gaz). Il est membre des artistes musiciens de Dunkerque de 1921 à 1979.
Il accompagne tous les ans les conscrits après le conseil de révision, pour une tournée des bistrots, salles de bals et maisons closes de Dunkerque et sa région. Son expérience de musicien formé au cirque lui permet d'être embauché dans les cinémas, il faut s'adapter très vite au déroulé de l'action comme au cirque. Il débute au cinéma l'Aviation rue de la Gare à Coudekerque-Branche, puis au Palais Jean-Bart, place de la République à Dunkerque et aussi au Royal Cinéma, place Jean Bart.
L'hiver il joue dans l'orchestre du théâtre, mais aussi au café des Arcades puis l'été il joue dans l'orchestre du café Belle Vue sur la plage de Malo les Bains avec ses amis des Arcades : René Cordier, le pianiste et chef d'orchestre, Marcel Périn, au violoncelle, Arthur Dehon et Louis Dondeyne, aux violons, Fernand Canpon à la trompette et Maurice au trombone.
Il n'a pas joué dans les bandes de carnaval, mais surtout dans les bals, et principalement le grand bal masqué du théâtre. Dans les années 1970 il est sollicité par son petit-fils Michel Deblock pour apprendre le solfège à ses amis musiciens du carnaval qui viennent de former le groupe Les Kakesteks avec Roch Vandromme, mais c'est une autre histoire…




mardi 14 octobre 2025

Une cloche du carillon de Dunkerque du XIXe siècle

 Elle a survécu au bombardements de 1940/45, et aussi à la fonte, comme ses sœurs qui ont certainement disparu pour fabriquer les cloches du carillon actuel
 
Elle porte plusieurs mentions :
- la signature du fondeur : ALJ VAN AERSCHODT SVCCESOR AL VAN GHEYN 1852
- au bas est gravé : La ville de Dunkerque à Paul Cappelle petit-fils d'Adolphe PIETERS, carillonneur de Dunkerque 5 Nov 1950
Elle est dans les collections du musée des Beaux-Arts de Dunkerque, ancienne cote n°473
Elle donne un LA
dimensions : hauteur 235 mm, diamètre 190 mm

photo Patrick Delaval

Elle a donc été fondue par André Louis Jean VAN AERSCHODT (1814-1888) fondeur de cloches à Louvain, successeur de son grand-père André Louis VAN DEN GHEYN (1727-1790)
 
Tous  les carillonneurs dunkerquois l'ont fait sonner. Le premier est Théophille MANOTTE, jusqu'en 1860, puis François Adolphe Bernard PIÉTERS (1832-1901) et ensuite son fils Adolphe Michel Édouard (1872-1932).
Paul CAPPELLE (1879-1952) est un écrivain, journaliste au Nord Maritime.
 
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photos Patrick Delaval
 
Le musée conserve cette seconde cloche, plus ancienne. Elle est datée de 1637 et provient de l'ancien hôpital Saint-Julien. Elle a été classée Monument Historique le 7 octobre 1935
Avec cette inscription : AMOR VYNCIT OMNYA
Elle donne un SOL
dimensions : hauteur 230 mm, diamètre 220 mm



lundi 6 octobre 2025

Le carillon de la ville de Bailleul

Par Ignace de Coussemaker, historien
extrait des Annales du Comité flamand de France 1883



On y détaille les travaux faits au carillon en 1716, sous la surveillance du Magistrat de Bailleul, dirigé par Pierre Henri de Coussemaker. Tous les membres du conseil sont mentionnés, avec leur biographie. Mais comme souvent, on oublie de parler du carillonneur. Dont on ignore les noms pour le XVIIIe et le début du XIXe siècle, à moins que quelqu'un les connaisse. Pour ma part et pour la fin du XIXe, je ne peux citer qu'un seul nom et encore c'est un hasard qu'il soit parvenu jusqu'à nous. En mai 1891, le chansonnier Alexandre Desrousseaux vient à Bailleul pour faire une excursion, le poète lillois était arrivé près de l'Hôtel de Ville, quelques instants avant que sonnassent au beffroi onze heures du matin. Or, le carillon, au lieu de jouer le refrain ordinaire, fit entendre tout à coup la célèbre Canchon Dormoire. C'était là une délicate attention du carillonneur, M. Freson, qui avait appris l'arrivée à Bailleul de l'auteur de la berceuse si populaire du Petit Quinquin. Desrousseaux, les yeux humides de larmes, s'arrêta et, la tête découverte, resta immobile jusqu'à la fin de ce concert improvisé en son honneur. Puis voulant prouver le plaisir que lui causait cette surprise il fit mander le carillonneur, lui serra affectueusement les mains et, prenant congé de lui, il ajouta : Je reviendrai un mardi-gras voir Bailleul en liesse, saluer son antique beffroi et les cloches de son carillon de 1742*, si aimable pour moi en 1891… Desrousseaux ne put réaliser sa promesse, car quelques mois plus tard, il ressentait les premières atteintes du mal qui devait l'emporter. Paul Van Houcke, témoin de la scène, in le Grand Écho du Nord du 24 février 1897.

Henri Freson n'est pas mentionné comme carillonneur dans l'état civil, son métier officiel est horloger, il devait probablement être aussi chargé de l'entretien de l'horloge du beffroi et de son carillon. Issu d'une vieille famille bailleuloise, il est né en 1838, il meurt en 1900.

le beffroi et son carillon

* Dans Mœurs populaires de la Flandre Française (1889), A. Desrousseaux est plus précis. Il reprend la source d'Ignace de Coussemaker : Les cloches du carillon, fondues en 1717 par Antoine BERNARD de Neufchateau (Vosges) fonctionnèrent pour la première fois, à l'entière satisfaction du Magistrat et des bourgeois, le 7 mars 1718. […] Cet instrument comprend 31 cloches, dont 23 portent des inscriptions diverses, ainsi que les armes de la ville. […]
Le carillon de Bailleul joue mécaniquement : 
- A l'heure, l'air de la Valse du havre (n°1500 de la Clé du Caveau) que Scribe a rendu célèbre […] composé par un certain Despinois.
 

- A la demi-heure, ce carillon joue un petit air dont on ne connaît pas l'auteur et qui ne date pas de plus d'une vingtaine d'années. On en trouve la notation, ainsi que l'air précédent, dans la brochure de M. Ig. de Coussemaker. Un carillonneur, rétribué par la ville, se fait entendre le mardi, jour de marché, de onze heures et demie à midi, ainsi qu'à toutes les cérémonies et fêtes locales et publiques.